La question du "débat démocratique"
1. La nécessité du débat moral
résulte de l'impossibilité, dans la plupart des problèmes moraux importants qui se posent, de déduire, pour une situation problématique
concrète donnée, les "bons choix" ( au sens moral ) , du simple énoncé général du Principe de la Loi Morale .
Il n'est pas possible de se fonder sur une simple expertise technique
(de "spécialiste" de cette Morale, connaissant "déclarativement" son
contenu )
pour déterminer un tel choix, lorsque la question traitée concerne plusieurs
sujets.
La nécessité elle-même de "prendre une décision" peut
être soumise au débat ( "méta-débat") de même que la façon dont, dans cette circonstance, la décision collective, si elle
doit être prise, doit être construite à partir des jugements de chacun des sujets ( procédure ) .
L'urgence seule peut venir interrompre le processus du débat
démocratique :
Chacun doit donc d'une certaine façon, "en son âme et conscience"
( c'est-à-dire en se référent à l'éclairage du Principe de la
Loi Morale qu'il admet librement ), juger, estimer, évaluer ..., jusqu'à quel point
la prolongation du débat entraîne plus de risques pour la
liberté de tous, que la prise d'une décision collective pas suffisamment débattue.
Remarque : une "situation d'urgence" est le résultat de contraintes du réel
que nous n'avons pas encore réussi, collectivement, à surmonter,
comme contraintes "inévitables".
Il est clair que l'une des caractéristiques d'un PROGRES
VERS PLUS DE LIBERTE, c'est la possibilité, pour tous ceux qui le veulent, d'être moins
fréquemment en
"situation d'urgence",- c'est-à-dire d'avoir à décider, à choisir sans avoir le temps de débattre -
( sauf si on choisit délibérément de se mettre dans une telle situation d'urgence,
auquel cas elle ne l'est pas vraiment, puisque justement on avait la possibilité de ne
pas y être ).
La "Liberté Absolue" contient donc dans son
concept, la possibilité de la délibération indéfinie, pour autant qu'elle serait nécessaire. Mais en même temps, dans l'idée de la
"Liberté Absolue", une telle délibération indéfinie n'est plus vraiment nécessaire, puisque les
problèmes moraux tels que nous les envisageons ici et maintenant, ne s'y poseraient plus .
2. La règle de la majorité n'est pas nécessairement la règle que nous devons suivre.
2.1. D'une façon générale la "bonne règle" (au sens
moral) de construction de la décision collective à partir des "voix" de chacun serait celle qui, dans
ce cas-là, permettrait le mieux ou le moins mal d'assurer le progrès de la Loi Morale (c'est-à-dire ... de la liberté de tous,
aujourd'hui et demain ) :
ce que justement on ne sait pas "déduire"...
On ne peut donc, politiquement et juridiquement, concevoir que des règles démocratiques
provisoires (dans le cadre de "Constitutions" ou de Chartes internationales
), toujours soumises à la délibération collective, elle-même régulée par le jugement
moral.
2.2. Cependant, DANS LE CADRE DE LA LOI MORALE ICI PROPOSEE,
il est clair que le Principe
de la Loi Morale lui-même, par définition,
ne peut pas être remis en question par un "débat démocratique",
puisque celui-ci est conçu ici comme fondé sur cette Loi Morale.
( Il peut évidemment être remis en question d'un point de vue extérieur,
si on pense pouvoir fonder autrement l'autorité du "débat démocratique" ).
Pourquoi ce cadre ne peut-il pas ici être remis en question par un "débat
démocratique" :
Non pas évidemment parce qu'il serait "transcendant" , ni parce que, comme le
pense Habermas, ou encore d'une autre façon Marcel Conche ( Le fondement de la morale, P.U.F,
1993 ) tous les hommes en général, lorsqu'ils se mettent à débattre entre eux,
présupposeraient implicitement un certain nombre de principes démocratiques par le fait même qu'ils cherchent à
débattre rationnellement,
mais parce que tous ceux qui participent au débat démocratique dont nous parlons
plus haut (§1.), ont déjà librement choisi ce Principe comme leur Loi Morale, et n'ont
donc plus à en débattre, sinon au niveau de la ou des FORMULATIONS ou REFORMULATIONS de ce
Principe.
Je ne parle donc pour le moment, dans toute cette
page,
que de la nécessité du "débat démocratique" entre tous ceux qui,
comme moi-même, acceptent librement le Principe.
Il est donc tout à fait clair pour moi, qu'en aucun cas une quelconque "majorité
politique" au sens du "plus grand nombre de voix" d'une quelconque communauté ou société
puisse remettre en question légitiment à mes yeux ma libre adhésion morale au
principe énoncé.
Le principe de l'égalité de ma voix parmi toutes les autres dans un débat
démocratique, ne vaut réellement à mes yeux que pour autant que les autres en question ont
d'une façon ou d'une autre ( sans doute sous une autre formulation que la mienne )
admis le principe énoncé.
Tout "débat démocratique" se réfère en effet à un "demos" ou
"peuple" ou collectivité de "citoyens", qui sont les "membres" de cette collectivité ou
association.
Il est clair que LA COLLECTIVITÉ DE RÉFÉRENCE dont il est question ici,
EST CELLE DE TOUS LES SUJETS POSSIBLES QUI FONT LE LIBRE CHOIX D'ADHÉRER AU PRINCIPE
ÉNONCÉ.
OU, SI ON PREND UNE VERSION "CONTINUISTE" DU DEGRÉ D'ADHÉSION, UN SUJET FAIT D'AUTANT PLUS ( OU MOINS) PARTIE DE LA
COLLECTIVITÉ AINSI DÉFINIE, QU'IL ADHÈRE LUI-MÊME PLUS OU MOINS A CE PRINCIPE.
( il s'agit ici bien sûr d'un choix moral et non pas de la
signature d'un contrat
ou d'une carte d'adhésion à une quelconque association concrète ).
D'une telle collectivité, aucun être humain, ni même un autre être en général,
n'est ni a priori exclu ni a priori inclus . Son "exclusion" ( comme son
"inclusion" ) ne peut-être qu'une auto-exclusion dans la mesure où il choisit librement
de ne pas adhérer à ce Principe, ou d'adhérer à des Principes contraires.
Son "inclusion" dans cette collectivité est aussi à mesure de la
libre adhésion morale au Principe énoncé qu'il reprend lui-même plus ou moins à son compte.
3. Ceci signifie que je déclare ici (dans
ces pages)
ce au nom de quoi je m'autorise à critiquer éventuellement d'autres "morales", les "fondements" de telle ou telle législation
ou déclaration de droits ou de devoirs, etc.
ce au nom de quoi je pourrais être amené éventuellement à m'opposer à d'autres formes de lois, dans une forme de "désobéissance civile" si de telles lois, manifestement en opposition avec le Principe énoncé , venaient à être votées "majoritairement" dans l' un quelconque des cadres juridiques et politiques collectifs réels, nationaux, européens ou mondiaux où je vis.
Si par exemple une majorité d'individus ( ou d' Etats au niveau mondial
) votaient pour l'abolition des libertés fondamentales telles qu'elles sont énoncées dans la Déclaration Universelle des Droits
de l'Homme, je ne me soumettrai évidemment pas à cette décision collective ( moralement du moins
...je ne préjuge pas ici de mon courage ni d'une stratégie éventuelle de soumission
apparente ... ).
Au nom de quoi dans ce cas un tel refus de la règle majoritaire ?
Bien sûr au nom du Principe de la Loi Morale Nouvelle.