A propos de la morale kantienne

Antoine Grandjean : “Le principe de base du kantisme, c’est : ne jugez pas moralement, si ce n’est vous-même”

Antoine Grandjean : “Il n’y a pas de morale kantienne”

Dans la conclusion de ce texte, Antoine Grandjean déclare :
L’absence de contenu déterminé de l’universalisme kantien (son “formalisme”) a par ailleurs un avantage : il ne s’oppose pas aux particularismes et aux situations singulières, comme on a tendance à le faire aujourd’hui. Il n’est simplement pas dépendant de telle ou telle compréhension du bien. Cet universalisme soutient que l’exigence morale revient à se donner des règles d’action dont on peut penser qu’elles sont universellement partageables. Charge à chaque individu, ensuite, de réfléchir dans une situation concrète pour déterminer si agir comme ceci ou comme cela serait universellement partageable ou non. Cet universalisme met cha­que individu devant ses responsabilités, en lui imposant de se poser un problème plutôt qu’en lui donnant des solutions ou des recettes. C’est un universalisme de l’invention de l’universel en situation.”

Exprimé ainsi, l’universalisme moral kantien pourra sembler très proche de ma propre proposition de “loi morale nouvelle” :
Traduit alors dans les termes de ma proposition d “Égale Liberté Libre Égalité,
la partie “gauche” ( “Égale Liberté” ) serait l’expression de cette exigence de l’ “universalisation possible” , exigence qui ferait partie de la “raison pratique universelle” que Kant prétend tirer de son analyse de la morale commune.
Et de façon complémentaire, la partie “droite” de ma proposition ( “Libre Égalité” ), correspondrait à ce qu’exprime Antoine Grandjean en disant “Charge à chaque individu, ensuite, de réfléchir dans une situation concrète pour déterminer si agir comme ceci ou comme cela serait universellement partageable ou non.“.

Si la distinction de la formulation du principe moral d’universalisation possible, de son application singulière en situation par chaque conscience morale individuée, est en effet très similaire dans l’analyse kantienne et dans celle que je propose à travers la formulation “Égale Liberté Libre Égalité”, il n’ en reste pas moins que le statut philosophique de cette “universalisation possible” est très différent dans la proposition kantienne et dans celle que je propose ( à titre … individuel … universalisable seulement par et pour les “personnes” qui font personnellement le libre choix d’adhérer à “ma” proposition ( “Égale Liberté Libre Égalité” ) en considérant que c’est absolument également aussi la leur, en toute autonomie de leur propre volonté.

La “raison” philosophique principale de cette différence fondamentale entre l’ analyse kantienne et ma propre proposition est précisément liée au fait que Kant prétend aboutir à une “métaphysique des moeurs” , tout en se rendant compte, d’après son propre système métaphysique, que la “racine” de la liberté de la volonté se situerait dans la réalité en soi d’un “monde intelligible” … dont pourtant nous ne pouvons par ailleurs rien connaître .

Or, dans ma proposition, il n’y a rien de tel, aucune prétention à fonder ma liberté sur un quelconque au-delà métaphysique d’un “monde intelligible” qui existerait “en soi” hors des capacités de notre connaissance :

Certes, comme dans la philosophie kantienne, le principe d’autonomie de la volonté et de liberté que je pose, est une capacité à distinguer cette autonomie de toute détermination naturelle ou culturelle dont il est possible d’examiner le fonctionnement dans le cadre de disciplines scientifiques empiriques.
Mais cette liberté de la position du “sujet libre” par rapport à tous les “objets” de sa connaissance possible, n’a besoin d’aucun autre “fondement” que cette liberté “elle-même” … pour et par les “personnes” qui se reconnaissent elles-mêmes dans une telle autonomie morale radicale, et qui donc, par leur propre libre décision personnelle ( “Libre Égalité” ), se reconnaissent mutuellement cette “Égale Liberté” radicale : c’est précisément l’ “auto-détermination” circulaire de la volonté qui se veut “elle-même” qui est à la fois la formulation la plus singulière, individuelle de chaque personne qui s’ “auto-détermine ” ainsi, et le critère d'”universalisation possible” le plus radical de cette volonté et donc d’ “Égale Liberté” puisqu’à ce niveau de “radicalité” , il n’ y a plus d’autre raisons, pour chacune des personnes qui choisit librement d’Y adhérer, de distinguer sa propre volonté fondamentale d'”autonomie personnelle”, de la volonté personnelle des autres “personnes libres et égales”, qui précisément, par définition, font ce même libre choix de se reconnaître mutuellement cette même liberté morale radicale.
Les différences interpersonnelles peuvent alors librement se développer sous la condition commune de leur régulation par ce principe commun librement accepté par ces personnes, à savoir le double principe d’ “Égale Liberté Libre Égalité”.

Ce que décident d’autres personnes pour leurs propres rapports moraux, politiques, économiques, culturels, sociaux, entres “entre elles”, ne NouS regarde plus, pour autant que de façon empirique concrète, leur “monde” NouS” laisse librement construire le “nôtre”, entre “NouS”, sachant qu’à tout moment, la perméabilité de la frontière entre ce “NouS” et son “dehors” est régulée par chaque personne là où elle est “située” par la réalité de sa vie actuelle : Chaque personne qui se veut librement participante du “NouS” de l’ “Égale Liberté Libre Egalité”, sait – puisqu’elle en a ainsi librement décidé elle-même – jusqu’où elle VEUT réellement participer à la réalisation d’un tel “règne des fins”, et sait donc qu’elle ne peut pas prétendre que les autres personnes librement engagées dans ce “nouveau contrat moral” doivent participer à une “réalisation concrète” – à leur manière – mais qu’elle-même s’en trouverait dispensé, puisque cela serait contraire à son propre libre engagement à être “parmi NouS” .

De même, toutes les personnes ( humaines ou autres ) qui choisissent librement de ne pas entrer dans un tel “nouveau contrat moral” d’ “Égale Liberté Libre Égalité”, ne peuvent pas, logiquement, venir se plaindre auprès de “NouS”, du fait qu’elles seraient “discriminées” et laissées “en-dehors” de ce “NouS”, puisque ce sont elles-mêmes qui, d’une façon ou d’une autre ne veulent pas s’engager moralement dans un tel nouveau contrat d'”Égale Liberté Libre Égalité”.

Qui n’est pas “parmi NouS”, d’après une telle définition :
Toute personne qui choisit par principe de ne pas considérer d’autres personnes comme “Également Libre” qu’elle-même , ou comme “Librement Égale”, alors que celles-ci accepteraient réciproquement de la considérer comme telles.
( Suite du texte en chantier … )