La proposition de l’ « Égale Liberté Libre Égalité » est- ELLE une proposition nouvelle dans le champ théorique de la « philosophie politique » ?

Dans « Qu’est-ce qu’une société juste ? » ( SEUIL, 1991 ), Philippe Van Parijs examine, en tant qu’ « introduction à la pratique de la philosophie politique » ( Sous-titre de l’ ouvrage ), diverses positions « classiques » en débat, notamment dans la philosophie politique « anglo-saxonne ». Il participe lui-même à ce débat, en essayant de défendre au chapitre 9, une position qu’il appelle « réal-libertarienne », et la considère comme une « réponse cohérente aux néolibéralismes », tout en examinant diverses objections possibles à cette position.

Sur un certain nombre de points, je pourrais rapprocher ma proposition de l’ « Égale Liberté Libre Égalité » de celle d’un tel « réal-libertarisme ».

Cependant, au moins un problème fondamental reste toujours le même, qui distingue ma proposition de pratiquement toutes les positions de « philosophie politique », c’est qu’elles ont toutes une « prétention à l’universalité », au sens où leurs auteurs prétendent faire de leur propre « théorie de philosophie politique » une théorie rivale des autres , dans un espace où il existerait une forme ou une autre de « vérité », comme il est possible de le postuler dans l’ espace des théories scientifiques des critères de « falsifiabilité » ( Popper ) qui permettent, au moins de façon provisoire minimale, d’établir un réel consensus dans la « communauté scientifique » sur les éléments théoriques et pratiques fondamentaux admis par tous les membres de cette communauté « dans l’ état actuel des connaissances » .

Ce qui différencie fondamentalement tout débat « philosophique », y compris dans les domaines techniques comme la « philosophie morale et politique » etc. ,
c’est que notamment dans les domaines où une certaine « normativité » est en jeu, la « liberté » de chaque participant individuel au débat, est directement et obligatoirement partie prenante, non seulement comme « objet » du débat, mais comme directement impliquée dans la pratique du débat et de l’argumentation.

Or, – et c’est une libre décision personnelle de ma part -, l’apparition « métalinguistique » de cette dimension de la liberté de chaque personne énonçant par elle-même, « librement », ce qu’elle pense de sa propre liberté, de celle des autres, et de « LA Liberté » en général, introduit un saut qualitatif dans la logique organisationnelle du débat qui ne saurait en aucun cas se réduire aux méthodes diverses d’établir un consensus de type « scientifique » concernant simplement soit le « constat factuel, observationnel ou expérimental » commun, soit le débat sur les meilleures « théories explicatives » à établir relativement à ces constats factuels.
Là où les controverses scientifiques proprement dites peuvent porter sur les méthodologies descriptives d’un « même réel supposé commun » ( postulat de « réalisme » physique fondamental des « objets de la science » , aussi complexes et organisés soient-ils ) et non sur les simples choix volontaires des uns et des autres, je pose librement que la question propre de la liberté elle-même, implique nécessairement la libre participation des libres choix des personnes concernées par ces débats, et n’est réductible d’aucune façon au simple examen des « explications » théoriques provenant de toutes sortes de « sciences humaines, psychologiques, sociales, culturelles, linguistiques, etc. « , effectivement intéressantes à étudier, mais dont les « conclusions factuelles » , si elles existent, ne sauraient en aucun cas servir directement de « norme » d’un quelconque « devoir être ».
Les débats sur la liberté et donc notamment sur une « Égale Liberté », ne peuvent donc, – dans ma proposition – faire l’économie de la rétroaction de la liberté de penser sur elle-même, qui se reconnait donc elle-même librement, comme « libre ».