Mes Moires du « Référentiel Numérique »

Il y a une trentaine d’années au moins, j’utilisais, en arrière plan de mes spéculations philosophiques, une structure esthético-métaphysique que j’appelais mon « Référentiel Numérique »:

Le fondement logico-mathématique formel de ce « référentiel » n’est rien d’autre que l’ensemble N des nombres entiers, donc avec en arrière plan les différentes façons dont les mathématiciens théorisent ces « Nombres entiers » de façon axiomatique.

Mais je ne retenais alors que certaines de ces propriétés mathématiques formelles qui m’intéressaient du point de vue esthétique et comme squelette général de formalisation personnelle de la « complexité » :

– le lien proprement mathématique avec la « théorie des groupes finis » , dont j’avais depuis longtemps pressenti l’importance, et connu l’importance en physique fondamentale pour les différentes « symétries » des « lois de conservation » , et particulièrement en physique quantique.

– le lien esthético-poétique avec les anciennes « symboliques des nombres« , et plus particulièrement, au niveau de la théorie musicale, la question du fondement mathématique de la composition des ondes sonores, et du choix apparemment culturellement arbitraire des échelles de hauteur constituant les « gammes » : en particulier la problématique des nombres premiers et de leurs multiples, et le fait que la théorie musicale ne retenait que les tout premiers nombres premiers et leurs multiples comme structure de base pour définir ses « gammes« .
Un questionnement évidemment sur la façon dont la question du « tempérament égal » ( supposant une référence mathématique aux « nombres réels » R et non plus aux seuls « nombres rationnels » Q ), permet de confondre très approximativement ( « à l’oreille » ) certains nombres entiers proches , mais appartenant à des séries de multiples très différentes ( Ainsi par exemple 120 et 121 ), et donc cependant de « JOUER » , musicalement, sur ces distinctions potentielles, que le « tempérament égal » de 12 demi-tons identiquement espacés sur une échelle logarithmique, cherche à fusionner formellement, tout en gardant en arrière plan l’antique fondement « grec » sur les fréquences multiples simples d’une vibration fondamentale.

Mon « Référentiel Numérique » a été pendant toute une période de ma vie une façon de relier formellement des domaines apparemment très différents, soit au niveau des théories scientifiques, soit au niveau de la créativité esthétique-artistique.
En particulier, il est possible de représenter la suite des nombres entiers de façon « spiralaire »logarithmique , où chaque tour de spire correspond aux multiples d’un nombre premier. Chaque tour finit par retomber sur un multiple du nombre premier servant de « fondamentale ».
Ainsi les octaves successives pour les puissances de 2 :
Les supposés « 12 demi-tons » de la gamme tempérée, peuvent alors être traduits de façon de plus en plus précise ( en termes d’ « encadrement du nombre réel par une suite de nombres rationnels » ) :
Ainsi une première approximation permet de comparer la suite des demis-tons aux nombres entiers compris entre 16 ( 2 puissance 4 ) et 32 ( 2 puissance 5 ),
et plus précisément sur les spires d’octaves plus hautes : par exemple entre 64 ( 2 puissance 6 ) et 128 ( 2 puissance 7 ) :
Entre ces deux octaves successives, on dispose de 64 « degrés » entiers intermédiaires. Rappelons que si les puissances de 2 permettent de dénombrer les « octaves », les puissances de 3 permettent de définir le « cycle des quintes », etc. , mais que les harmoniques 7, puis 11, 13, etc.. d’une même fréquence fondamentale sont considérées rapidement comme de plus en plus perceptivement indistinctes, même si en théorie « rationnelle » des harmoniques, et même en analyse physique du son, il est possible de les distinguer et de les détecter … )


Mais ce « Référentiel Numérique » que j’utilisais est également en lien avec certaines de mes idées concernant les valeurs fondamentales et la possibilité de définir ( LIBREMENT ! ) une forme d’ équivalence des personnes comme « personnes libres et égales » ( en résonance partielle avec les concepts de Rawls ), et de se poser la question du « dénombrement » de telles « personnes » potentiellement à la fois LIBRES ( donc posant leur propre identité en toute autonomie les unes par rapport aux autres ) et ÉGALES entre elles du fait même de leur référence autodéterminée à cette « LIBERTÉ » :

En tant que prenant chacune des décisions autonomes, les volontés personnelles se distinguent les unes des autres « numériquement », comme autant de « de degrés liberté » d’une « variable formelle anonyme », se signalant chacune cependant dans la discontinuité de cet « arbitraire de la volonté »
( ce que « je veux », n’est pas nécessairement, ni obligatoirement ce que « tu veux », ni ce que chacune de ces « personnes libres et égales » peuvent « vouloir » ( « C’EST VOUS QUI VOYEZ » ))
Mais par ailleurs, comme dans le modèle formel des nombres entiers, toutes les « personnes libres et égales » sont de « nombre » potentiellement « infini dénombrable ».
Mais ce nombre est réellement physiquement dépendant des ressources disponibles localement, là où la complexité matérielle nécessaire à leur prise de conscience cérébrale comme « personne libre et égale » et à leur organisation corporelle d’interfaçage avec le reste de l’univers, rencontre des limites au moins provisoires ( voir par exemple le problème « écologique » de la surpopulation humaine par rapport aux « limites de la planète » ).

Ceci résulte du postulat purement « matérialiste » que je pose qu’aucune organisation consciente d’elle-même dans l’univers ne peut exister sans le « support » d’une organisation matérielle suffisamment complexe ( pas nécessairement sous la forme du système nerveux actuel des animaux et donc des humains, mais donc d’une matière organisée qui rend possible l’émergence de ce que nous appelons notre « subjectivité consciente » )

Cela n’a donc rien à voir avec ce que peuvent être des spéculations métaphysiques sur la façon de « compter » des « âmes » ou des « esprits individués » , pour ceux qui posent l’existence de telles « substances pensantes » distinctes ( par la « volonté divine » ou la structure métaphysique du « monde des âmes ») de l’organisation matérielle « pensante » émergente de la complexité organisationnelle de la « matière » ( compréhensible en termes de physique, de chimie, de biologie moléculaire, de biologie évolutive, de neurosciences, de sciences « humaines » tenant compte des dynamiques de la complexité organisée des écosystèmes incluant les « humains » ).

Chaque « personne libre et égale » se constitue ELLE-MÊME dans l’unité autonome et autodéterminée de sa « volonté » ( équivalente en ce sens d’une « unité numérique » discontinue « dénombrable » par rapport à d’autres « unités » équivalentes ), mais n’en a pas moins besoin fondamentalement de garantir un niveau suffisant de « ressources physiques » nécessaires et suffisantes pour « conserver » cette autodétermination complexe pilotée par son cerveau et peut-être même par des circuits spécialisés passant par le « cerveau frontal »

Chaque « personne formellement libre et égale » doit donc, si elle veut continuer à l’être dans son organisation corporelle actuelle, penser aussi à assurer suffisamment de quoi « nourrir » cette organisation biologique en fonction de son intégration « personnelle » propre dans un « environnement » qu’elle n’a pas initialement choisi, mais à partir duquel elle PEUT essayer de se développer davantage, comme « personne réellement libre » TOUT en respectant le droit fondamental autonome et autodéterminé des autres « personnes libres et égales » de pouvoir elles aussi et tout autant, garantir leurs propres « ressources physiques » de support de leur propre « ÉGALE LIBERTÉ ».

Or il devient alors évident que la distinction « numérique » des « personnes libres et égales » entre elles n’a d’importance, pour chacune d’entre elles, que pour autant qu’elle se trouve encore dans la nécessité matérielle d’assurer dans son environnement corporel local, au moins certains aspects de ses ressources nécessaires à la conservation de son identité consciente biologique actuelle, situation qui, comme chacun le sait, est potentiellement en conflit permanent de concurrence avec les autres pour de telles ressources limitées. ( Comme dans tout le monde vivant où nous trouvons notre « berceau » ).

Mais cette distinction numérique des différentes « personnes libres et égales », n’a pas de sens formel, dès qu’il devient réellement possible, au moins pour une toute petite partie, de mettre en « COMMUN » , donc au service d’un « Projet universalisable des personnes libres et égales » , la mise à disposition égale des ressources physiques de l’Univers nécessaires pour garantir à chaque « personne libre et égale » la continuité et le développement de son « ÉGALE LIBERTÉ ».

En particulier il ne saurait alors Y avoir de contradiction formelle fondamentale entre les « personnes libres et égales » physiquement réelles actuellement sur Terre, et toute « personne libre et égale » future possible ( pour les générations humaines futures sur Terre, mais plus universellement pour toute organisation matérielle consciente d’elle-même dans l’ Univers ), SI celle-ci adhère LIBREMENT au même principe d’ ÉGALE LIBERTÉ définissant formellement toute « personne libre et égale » à partir de sa propre volonté autonome et autodéterminée.

En un certain sens donc, mais sans aucun présupposé de type religieux ou « spiritualiste » ou « transcendantal » ou philosophiquement « phénoménologique », nous nous appuyons, du point de vue des « ressources matérielles disponibles dans l’Univers », sur une conception matérialiste « émergentiste » ( les propriétés particulières du « vivant », puis de la « subjectivité consciente humaine », émergent dès qu’un niveau particulier de complexité de l’organisation matérielle est évolutivement atteint, les modalités de cette évolution elle-même n’ayant besoin d’ aucune « conscience », ni même de « finalité » pour devenir explicables quant à leur « origine »).

A partir du moment où au moins certains humains passés ou actuels décident librement de la valeur de leur propre LIBERTÉ et décident simultanément qu’une telle LIBERTÉ personnelle doit être au moins formellement compatible avec la LIBERTÉ aussi radicale de toute autre « personne libre et égale » qui prendrait cette MÊME libre décision, ces personnes peuvent alors décider en conséquence de faire progresser ce Projet Idéal Commun, d’un statut de pure proposition formelle, à des tentatives d' »incarnation » réelle ( physiques, techniques, économiques, juridiques, politiques, etc. ) d’un tel Idéal, car elle savent qu’elles en ont elles-mêmes librement décidé, et que nulle « loi », ni physique, ni « morale » ne les Y contraint, ni ne les Y oblige :
Seule la « Loi Morale Nouvelle », issue de leur propre libre volonté autonome, comme « LIBRE ÉGALITÉ », peut dans le même geste, instituer une forme de « volonté générale » ENTRE ces « personnes libres et égales ».

Une forme jusqu’à présent encore partiellement « impensée », puisque la plupart des philosophies morales et politiques qui ont soutenu des idéaux voisins, considèrent qu’un tel projet est « naturellement » ou « intrinsèquement » propre à une « nature humaine universelle », et s’impose donc, en termes de « droit naturel« , à l’ ensemble des « êtres humains » : l’ exemple typique en est la « Déclaration Universelle des Droits Humains » de 1948 ainsi que de la « Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen » française de 1789.
Il s’agit alors d’une forme de « FRATERNITE » supposée propre à la « famille humaine » ( et que les « animalistes » actuels accusent d’être du « spécisme » )

Les philosophes ou les personnes en général qui récusent un tel « Droit naturel », et pensent uniquement en termes de « droit positif » ou encore en termes de « culture communautaire » qui imposeraient à leurs membres une obéissance coercitive consciente ou inconsciente, n’admettent pas non plus, mais cette fois ci au nom d’une supposée supériorité intrinsèque du « collectif concret » ( « peuple », « nation », « civilisation » …, « famille », « patrie » … ) encadrant toute décision ou choix « personnel » .
Il s’agit alors d’une autre forme de « FRATERNITE » supposée plus fondamentale dans une « communauté historique concrète … »


Il est assez facile de comprendre en quoi notre « Proposition d’ Égale Liberté Libre Égalité » ne correspond ni aux tenants du « Droit Naturel » et »humaniste universaliste », ni aux prétentions « des « collectivistes » des « communautariens » ou des « nationalistes » , ou des « marxistes » tenant de la « lutte des classes » et de la « dictature du prolétariat » …,
ni aux conceptions des « libertariens inégalitaires » ( de « droite » ) , qui prétendent défendre une liberté individuelle où l’intérêt bien compris de chacun dans un « marché libre » sans aucune « volonté générale », apporterait une « harmonisation » minimale suffisante pour empêcher que les inégalités incontrôlées finissent par miner les « libertés individuelles fondamentales » auxquelles ces « libertariens » prétendent cependant être essentiellement attachés.

On comprend alors aussi pourquoi nous ne proposons pas la « FRATERNITE » comme fondement de notre « Loi morale nouvelle », car elle est beaucoup trop ambiguë dans ses références et préférences de « famille » ou de « proximité » ou de « généalogie biologique ou culturelle commune » , et que nous avons choisi de souligner ces fractures en la renommant « FRACTERNITE » !

Quant à VOUS, c’est VOUS qui voyez ….


Mes Moires Imaginaires

La mythologie des Trois Moires plonge bien sûr dans les profondeurs archaïques d’un supposé « Destin » qui déterminerait le « fil » de chaque vie, depuis la « naissance » jusqu’à la « mort ».

Bien évidemment, il est difficile de démêler dans ces fils, la part de réelles déterminations scientifiquement référençables, mais qui déjà, à cause de la complexité même des processus d’organisation de la matière aux différentes échelles peuvent difficilement être prévisibles en dehors d’un espace de probabilités statistiques, et la part de significations imaginaires et symboliques qui se filent ou se tissent avec ces déterminations réelles en formant toutes sortes de motifs enchevêtrés où nous projetons nos détecteurs de « figures » plus ou moins étranges ou familières à reconnaître.

L’émergence de la liberté, et de sa libre récursivité, en reprenant sans cesse ces brins tissés dans le « passé » ( personnel, humain historique, évolutif vivant et cosmologique ), reconfigure dans l’épaisseur d’un « présent » auto-organisateur, les probabilités des configurations futures.

Au carrefour des bifurcations du « présent », nous ne savons pas tout ce qui peut devenir en jour possible, là où, comme on dit quelquefois, la « réalité dépasse la fiction ».

En particulier, les conditions physiques organisationnelles actuelles de l’ émergence de notre « conscience » humaine individuée, ne sont pas nécessairement éternellement les mêmes que celles qui ont présidé à l’ évolution biologique des structures cérébrales humaines actuelles.

Rien ne nous contraint à penser que la « solitude métaphysique » d’une conscience individuelle « mortelle » dans laquelle beaucoup d’humains actuels pensent leur « finitude », échappe nécessairement à notre pouvoir de transformation du réel, et que d’innombrables formes de « consciences futures » sont pensables, sur la base de toutes sortes de « complexification » de l’organisation de la matière. Formes d’organisation où, même « morts » aujourd’hui, notre « conscience personnelle » dans et par laquelle nous identifions aujourd’hui notre existence peut parfaitement se « réveiller » ( comme dans la « Métamorphose » de Kafka ) en se reconnaissant elle-même comme ayant déjà existé, tout en étant simultanément un état ou une structure fonctionnelle d’une telle « conscience future » :

Rien ne contraint de telles « consciences futures » plus complexes que celles que nous connaissons aujourd’hui, à se limiter a priori à une « conscience de soi » exclusive, excluant que cette conscience puisse être « en même temps » fonctionnellement partagée avec toutes sortes de consciences distinctes mais « connectables » dans une expérience de « conscience de soi » partagée, soit contemporaines, soit ayant existé dans le passé, et qui donc se « réveilleraient », à la manière dont nous-mêmes aujourd’hui « reprenons conscience » après le sommeil ou une anesthésie ou un coma.

Jusqu’à présent, dans nos cultures, une telle perspective était réservée à une croyance religieuse, tant il fallait pour l’imaginer, se référer à des « pouvoirs divins » transcendants que nous pouvions difficilement penser comme « humainement » accessibles.

Mais dans la perspective strictement moniste matérialiste évolutionniste émergentiste qui est la nôtre, comprenant notamment toute « conscience » et donc aussi « conscience de soi » comme résultant d’un fonctionnement hautement complexe de la matière organisée, et en aucun cas comme constituant une « substance » mystérieuse qui viendrait s’ajouter de façon incompréhensible à une « substance matérielle » pensée comme simple et passive, rien n’exclut l’émergence de nouvelles propriétés encore plus inattendues de la matière organisée, et notamment si celle-ci inclut en retour les effets spécifiques de l’ « autonomie de la volonté » progressivement acquise lors de l’ évolution et de l’histoire culturelle humaine.

Dans un but de simple exploration « artistique » ( où « Esth-ELLE » prends quelquefois les traits fictifs de « Kate Astrophe » ), nous pouvons donner libre cours aux échanges avec les algorithmes de « Midjourney », pour donner « chair » aux fictions oniriques d’une future « connectivité » organo-cérébrale généralisée tissant toutes sortes de « morphogénèses ».

On y reconnaîtra peut-être aussi les inséminations du moule-patron , d’un personnage du Jardin des Délices, que j’ai souvent choisi comme avatar personnel de « Porte-Moule » , en guise de passager clandestin dans divers collages réalisés par « Kate Astrophe »

Le « porte-moule » dans le Jardin des Délices

Remarque : Le thème général du « moulant-moulé », de l’ « objet-dard »
( L’Etang-Dard sans gland est le V ! ), jouant aussi sur le genre de « le moule / la moule », passant par les « Neuf moules mâliques » également de Duchamp,
a été également, en son temps ( printemps été 2005 ), l’une des thématiques composantes de la fameuse « Instabullation Pasiphiste » « De l’ Art d’escalader l’Everest« , orchestrée par Vincent Cordebard en Mai-Juin 2005, au sein de l’ équipe des « Quip’s » de l’ Araignée Quipudep

Autre remarque impromptue et inopinée :
L’ Etang-Dard peut aussi faire allusion à la « Guêpe » du Grand-Verre , qui brandit en effet le « nuage » de la Mariée comme un « étendard » …
Les « célibataires » sont-ils terrifiés par le Venin de Vénus ?

Le supposé paradoxe de la question « Pourquoi suis-je moi ? »

Je parle ici d’une question reposée par François Galichet dans son ouvrage « Mourir délibérément ? » ( Presses Universitaires de Strasbourg mars 2014 ).

Cette question « Pourquoi suis-je moi ? » est notamment traitée au chapitre 5 de l’ouvrage , chapitre intitulé « Qui veut mourir ?« 

En posant ainsi la question de l’ « identité du sujet » supposé vouloir sa propre mort.
Remarque : la question « Qui veut mourir ? » est sans doute aussi philosophiquement proche de la fameuse question posée par Jean-Luc Nancy « QUI vient après le sujet ? » .
Mais je ne traiterai pas ici de ce rapprochement.

Je constate simplement que la question « Pourquoi suis-je moi ? » est facile à poser, et est même posée par de très jeunes enfants.
Mais les philosophes qui cherchent à y répondre, soit finissent par « dégager en touche », en prétendant qu’il s’agit d’une énigme insoluble, soit répondent en fait chacun à sa façon, à partir de leurs propres présupposés ou préjugés philosophiques.


La question posée, après d’autres … , par François Galichet,
est donc « Pourquoi suis-je moi ? »
P.110 :
« Pourquoi suis-je moi? » ne signifie pas : pourquoi suis-je ainsi, avec ces caractéristiques, ces qualités, ces propriétés […]
« Pourquoi suis-je moi? » signifie : pourquoi les suis-je, elles et non d’autres que je pourrais avoir ou être tout aussi bien ?

« TOUT AUSSI BIEN » , vraiment ?

Qu’est-ce qui permet d’affirmer avec une telle certitude apparente que le « je » en première personne qui affirme ainsi son existence « arbitraire radicale » incompréhensible, pourrait être « tout aussi bien » être le MÊME SUJET, mais avec des « caractéristiques », des « propriétés », des « qualités » tout à fait différentes ?

Or les catégories et concepts avec lesquels chaque philosophe, ou personne en général, pense sa propre « identité subjective« , sont :

  • à la fois très générales ( propres à la structure générale du cerveau humain ou hominidé, ou … de tout organisme matériel capable de se représenter ce qu’il entend par « identité subjective » ou comme étant sa « propre identité consciente d’elle-même » ), et peuvent alors être caractérisées par différentes disciplines scientifiques qui pourraient construire un savoir interdisciplinaire sur cette question, et donc sur des explications tout à fait « empiriques » de cette conception ou perception de soi comme « arbitraire radical » :
    L’organisation actuelle des circuits cérébraux humains, malgré les différences individuelles , d’apprentissage et d’éducation culturelle, révèlerait alors à la fois la capacité humaine générale de se poser se genre de question « Pourquoi suis-je moi ? »
    et les raisons d’une supposée incapacité radicale ( « arbitraire radical » ) d’y répondre … qu’on pourrait alors un jour modifier en modifiant partiellement l’organisation du cerveau humain, ou en général des organisation matérielles « conscientes d’elles-mêmes ».
    Cette « organisation générale » des cerveaux humains, pourrait aussi, après analyse « empirique », montrer en quoi consiste, « empiriquement », non pas une réelle « incapacité radicale arbitraire » à se penser elle-même, mais bien une résistance inconsciente ( ou au contraire consciemment voulue ) d’un grand nombre d’êtres humains ( … mais pas tous … ) à pouvoir ou vouloir se penser ainsi radicalement comme « personne libre et égale », et à se soumettre « arbitrairement » à toutes sortes d’ « autorités » , réelles, imaginaires ou « symboliques », considérées comme les authentiques « arbitres » de leur situation. ( A commencer bien sûr par le superlatif « arbitre divin » … )
  • ou alors très spécifiques à chaque « penseur », à son parcours personnel, ou liés à sa « culture » et à la façon dont cette culture , notamment philosophique, a jusque là pensé l’ « identité subjective » d’une personne, ou la sienne propre … « en toute subjectivité »
    Mais ces conceptions personnelles ou culturelles extrêmement variables peuvent alors aussi être considérées comme des faits empiriques dont on peut étudier scientifiquement la distribution variée … et même aujourd’hui en révéler les traits statistiques principaux grâce à une « intelligence artificielle ».

    Bien sûr, en rapportant ainsi, dans les deux cas, la perception d’un « arbitraire radical » de notre « identité subjective« , à une constitution « empirique » matériellement organisée de notre « être », même si elle est encore inconnue, et non à une constitution « transcendantale » ou d’un « en soi » métaphysique radicalement inconnaissable, je fais moi-même un choix « philosophique », en présupposant qu’une « réponse » en termes de connaissances scientifico-techniques et donc en ce sens « empiriques« , pourra être construite dans un avenir ouvert, si on considère qu’une telle réponse n’est pas aujourd’hui clairement formulable.

Si donc on fait l’hypothèse, à la manière de François Galichet, que « je » pourrais avoir « tout aussi bien » les caractéristiques empiriques que nous trouvons chez les « autres », c’est affirmer d’une façon ou d’une autre la distinction, sinon la séparabilité, du noyau réflexif identitaire d’une « conscience de soi » ( donc sa capacité générale, et qui est donc présente chez toute personne qui se pose la question … , à moins de penser, en termes « solipsistes », que cette question « radicale » n’est propre qu’à certains « esprits philosophiques » ), et de la grande variété des « contenus de pensée » possibles ( y compris ceux qui paraissent nous singulariser par rapport à d’autres )

Mais comme je l’ai dit précédemment, dans ces deux cas, et notamment en ce qui concerne le « noyau réflexif identitaire » d’une « conscience de soi » en général, je pose que rien n’empêche a priori ( sauf une croyance a priori d’une telle impossibilité de connaissance « arbitraire radicale » ) , qu’un développement scientifico-technique futur nous donne un éclairage beaucoup plus précis et efficace sur cette supposée « incapacité radicale ».

A propos donc de la distinction entre ces deux aspects, à savoir d’un noyau général d’organisation formelle de notre « conscience de soi » comme capacité, et d’un autre côté d’un contenu particulier variable et éventuellement aléatoire de cette conscience de sa propre identité,

De deux choses l’une :

A – Ou bien c’est faux : il n’y a pas de telle séparabilité radicale, c’est une pure illusion de croire une telle séparabilité du « sujet comme tel » ( comme capacité générale, y compris comme supposée identité numérique « arbitraire radicale » ) , par rapport à toutes les caractéristiques empiriques de l’organisme incarné dans un environnement qu’il est par ailleurs ( en tant que « moi empirique » ) :

D’une façon ou d’une autre il s’agit là d’une thèse dualiste, soit à a manière cartésienne d’une dualité des « substances », soit du dualisme « empirique »/ »transcendantal » ou « phénomène / noumène », etc. à la manière kantienne, soit de l' »originaire » phénoménologique par rapport à ce qui est contenu dérivé , etc. )

Que certaines propriétés de notre organisme individuel , les plus « extérieures » , soient « accidentelles » et aléatoires, ne signifie pas nécessairement qu’elles le soient toutes, en particulier toutes celles qui définissent nos capacités d’activités mentales conscientes, nos capacités mémorielles et linguistiques, notre puissance imaginaire, etc. : toutes les capacités qui permettent en fait l’exercice de notre « pensée réflexive », capable de « se prendre elle-même comme objet » .

Derrière une thèse d’ « arbitraire radical« , comme celle de François Galichet, on trouve en fait les thèses tout à fait classiques de type métaphysique où l’ essentiel du « sujet » connaissant est pensé ( par ce même sujet … empiriquement conditionné par sa culture ) comme lui échappant :

– soit comme pour la « res cogitans » cartésienne, parce que la pensée consciente est supposée alors totalement transparente à elle-même ( quelles que soient les erreurs possibles sur le contenu des pensées, ces pensées en tant que « claires et distinctes » sont aussi transparentes à elles-mêmes que le peut la nature même de cette conscience « cogitans« , et donc si on n’en sait pas plus, dans cette « claire conscience de soi », c’est qu’il n’y a rien de plus à savoir, et que tout le problème ne se reporte que sur l’articulation « obscure et confuse ? » des deux substances … et/ou sur l’infinité inaccessible d’un « pouvoir divin » qui en assurerait la miraculeuse conjonction »

– soit au contraire pour le « sujet constituant » kantien, ce sujet proprement dit, comme « existant en soi« , est à proprement parler inconnaissable, puisque nous ne pouvons connaître ( prétention « universalisante » du philosophe Kant … ) que des « phénomènes » et non les « choses en soi » …

Une grande majorité de philosophes semblent donc se donner le mot, tout en s’appuyant sur des thèses opposées et au moins diverses, pour proclamer ( c’est en fait leur « arbitraire radical » personnel : celui de leur propre choix philosophique sur lequel il leur est « impossible » de revenir ), que ce qu’il y a de plus « propre » dans notre « identité subjective », est un « arbitraire radical » qui échappe nécessairement ( ou par la volonté inconsciente du philosophe … ) au pouvoir d’investigation de la science et de la « Raison » en général.

Mais il se peut que nous pouvons percevoir certaines de nos capacités comme empiriques aléatoires que parce que nous avons certaines capacités cognitives humaines personnelles propres qui, si nous ne les avions pas, nous empêcheraient précisément de nous penser comme « ce que nous pensons être » :
Si nous n’étions pas un « être humain » avec un cerveau d’être humain, mais comme dans l’exemple cité par F. Galichet, un « axolotl », nous ne nous poserions pas du tout une telle question « Pourquoi suis-je moi ? » .

Il existe donc des caractéristiques toutes « empiriques », mais essentielles pour permettre à une personne humaine de « philosopher  » ainsi : Quand je parle de moi-même comme « sujet », il s’agit bien d’un ensemble de capacités « cognitives » qui peuvent se retrouver « tout aussi bien » chez la plupart des êtres humains, et même pour certaines, chez de nombreuses espèces animales, etc.
Il faut donc au moins distinguer ces capacités très générales et « anonymes » d’un cerveau complexe, des particularités des « mémoires biographiques » construisant des « récits mémoriels individuels » où le « je suis moi » se conforte, et plus encore des représentations perceptives que chacun peut avoir de son corps propre ou de l’extérieur du corps des autres.

B – Mais d’une certaine façon, il y a aussi du vrai possible dans cette « séparabilité » du sujet abstrait « sans qualités » précises de telle ou telle des propriétés qu’une description empirique extérieure peut m’attribuer.
Mais dans ce cas, qu’est-ce qui permet de dire qu’il s’agit d’un « arbitraire radical » métaphysique ou transcendantal ou « originaire » que rien d’empirique ne pourrait combler ?
Sil est vrai qu’en effet « je » pourrais avoir telle ou telle propriété particulière que d’autres ont et que je n’ai pas, qu’est-ce qui interdirait en soi que « je » puisse également les acquérir ?

Il se trouve juste, que pour le moment, je ne les ai pas, mais rien n’interdit , en particulier dans un développement technique futur, que « je » n’acquière de telles « qualités » … ou propriétés non « essentielles ».

Le « Pourquoi suis-je moi ? » n’a alors rien de « métaphysiquement » arbitraire , mais est purement lié à une situation actuelle de limitation actuelle de notre biologie cérébrale humaine ou des techniques biologiques, qui dans un futur possible « me » permettraient de devenir en effet « tout aussi bien » semblable à n’importe quel « autre » et réciproquement : il s’agit alors d’une capacité générale de « plasticité » de nos personnalités qui n’est pas aujourd’hui accessible aux êtres humains, en effet, et qui nous « condamnent » encore à rester dans « notre peau » …

Si on objecte alors que le problème n’est pas tellement de pouvoir se transformer suffisamment ( « métamorphose » kafkaïenne généralisée ) pour pouvoir acquérir toute caractéristique empirique perceptible ou imaginable chez d’autres, mais que dans tous ces cas là , chaque « personne » n’en continuerait pas moins à se sentir et à se penser comme « enfermée » dans son « monde » ( illusion « solipsiste » ), sans pouvoir en sortir, je réponds alors que cela est dû, non à une « solitude métaphysique originaire », mais simplement à la connectivité neuronale beaucoup plus dense à l’intérieur de notre système nerveux et notamment de notre cerveau, comparée aux types de « connexions » linguistiques, communicationnelles, sociale, culturelles, ou encore « écosystémiques » naturelles etc. que nous entretenons avec les « autres »,
dont le réseau de connexion, aussi complexe soit-il déjà , comme en attestent les systèmes de « communication d’information »dans les écosystèmes, n’atteint pas la densité intégrée multi – réflexive caractéristique de nos cerveaux humains.

Le problème est alors encore une fois, de nature « scientifico-technique » :
Comment construire des connexions beaucoup plus denses entre différents cerveaux, de façon que cette connectivité puisse devenir similaire à celle qu’entretiennent par exemple nos deux hémisphères cérébraux ( connectivité que l’ évolution biologique a réussi à établir et à maintenir en la complexifiant )

Bien sûr il serait nécessaire d’avoir de longs processus d’apprentissage, pour que les cerveaux ainsi connectés beaucoup plus densément, apprennent à constituer une expérience consciente commune d’un tel « soi augmenté », à la manière dont nos deux hémisphères ont appris à coordonner leurs activités dans la production d’une « conscience de soi unifiée ».

Il est probable aussi que la nécessité de coordonner une action extérieure à travers un ou plusieurs « corps  » cherchant à suivre un même projet ou une même forme ( à la manière de la coordination actuelle de danseurs ou de musiciens, ou autres « collectifs » dont la coordination est capitale), est un élément canalisateur très puissant de la « conscience de soi » potentielle d’une telle entité complexe.


Dans les deux cas ( A ou B ci-dessus ) , je peux parfaitement considérer que là où François Galichet perçoit ( croyance philosophique ) un « arbitraire radical », je ne conçois qu’une limite empirique actuelle toute relative qui pourrait être un jour transcendée par le « progrès scientifique et technique » .
En tout cas, en pensant au moins un tel développement comme « possible » en termes scientifiques et techniques, on ne se ferme pas a priori les portes, comme le font les philosophes de l' »arbitraire radical » …

Qu’aujourd’hui les êtres humains avec la configuration de leur organisation corporelle et cérébrale actuelles ne puissent pas « sortir » de la « condition humaine » actuelle, et se sentent « enfermés » dans l’organisation biologique individualisée qu’ils ont héritée du passé évolutif de leur espèce, ne signifie nullement qu’il s’agisse d’un « arbitraire métaphysique radical » :
C’est bien plutôt cette croyance qu’ils s’imposent à eux-mêmes « arbitrairement », comme « allant de soi », parce qu’ils n’ont pas d’autres expérience possible à disposition.

Ni plus ni moins que de s’imaginer être une « âme spirituelle » dans un « corps matériel » en se laissant abuser par les simplifications représentatives de tels « concepts » .

En réalité, « nous » ne savons pas encore réellement ( scientifiquement ) tout ce que nous « sommes » ou pourrions devenir.

La question « Pourquoi suis-je moi? » qui semble à première vue très subtilement « profonde », est peut-être tout simplement encore mal posée :

Quand on voit combien en fait l’imaginaire métaphysique des philosophes, y compris les plus « grands penseurs » parmi eux, produit en fait, pour chacun d’entre eux, des représentations conceptuelles diverses personnelles sur ce que c’est que « penser » ou les conceptions très différentes que se fait un Descartes de la « substance pensante » qu’il « pense » être, et du « sujet transcendantal » qu’un Kant s’évertue à penser comme « inconnaissable » en soi, ou des « phénoménologues » qui prétendent penser l’ « originaire » … … je considère pour ma part, qu’on est simplement encore, dans ces conceptions « métaphysiques », dans la préhistoire d’un savoir que seules les connaissances scientifiques et les performances techniques futures pourront reformuler de façon aujourd’hui sans doute encore inimaginable :

C’est le progrès des « neurosciences » et de la compréhension des systèmes matériels organisés complexes qui permettra plus probablement de sortir des actuelles apories de l’ « arbitraire radical » dont certains philosophes comme François Galichet croient pouvoir nous « éclairer ».

Assurément, nous aurons encore bien des surprises sur « ce que nous sommes » ou pouvons potentiellement être, devenir, … ou redevenir, y compris après ce que nous croyons aujourd’hui être notre « mort » et sa supposée irréversibilité.

Certaines « expériences de pensée » peuvent cependant dès aujourd’hui nous défaire de certaines « certitudes de bon sens » :

Qu’est-ce qui, « logiquement« , nous empêcherait de nous « réveiller » un jour, après notre « mort » aujourd’hui supposée irréversible ? Et de nous « rappeler » de toutes sortes de « vies antérieures » partiellement oubliées et diversement « remixées » ? Et de visiter ou revisiter les « mémoires » et les « identités » des « autres » ? D’autres que « moi » ont déjà proposé que « Moi est un autre … »

Bien sûr, un tel système matériel organisé, faisant suite dans des siècles, des millénaires, voire seulement des millions d’années ( ? ), à la forme de vie « humaine » actuellement résultante de l’ évolution biologique et « culturelle » de l’ « écosystème Terre », et rendant possible, dans cette nouvelle forme supérieure de conscience émergente, le « souvenir » auto-re-organisé de « consciences » ayant déjà vécu comme « être humain » , seront simultanément aussi, « conscience de soi » de ce pouvoir « multi-conscient » de faire émerger d’autres consciences « similaires », actuelles, passées ou futures
Certains dirons alors que seule cette « super-conscience » serait la « véritable conscience » et que les différentes consciences partielles composantes, notamment celles qui se considéreraient comme « ayant déjà existé », ne seraient que des « illusions » .

Mais n’est-ce pas là un postulat arbitraire, de penser qu’une « conscience de soi » est nécessairement « une et indivisible » et qu’une « identité consciente » nait et meurt « radicalement pour toujours » , avec la disparition du seul corps dont elle a pu faire l’expérience lors de son « unique vie », quels que soient les réorganisations matérielles futures imaginables de l’univers ?

Ne s’agit-il pas là d’une croyance métaphysique héritière de la notion d’ « âme individuée » unique, telle que la tradition chrétienne en a produit la représentation culturelle, notion qui n’est pas nécessairement déjà celle d’ autres cultures traditionnelles ( cf . la « transmigration des âmes » qui dissocie l’unité identitaire d’une telle « âme » de l’identité unitaire des « incarnations successives ) ? Et qui surtout n’est pas le dernier mot des évolutions futures possibles de la matière organisée, notamment à partir de moment où une telle évolution est de plus en plus techniquement contrôlable par les êtres conscients eux-mêmes.

La question devient alors plutôt de nature scientifico-technique ,
C’est à dire où l’aspect actuellement de « science-fiction » vient simplement prolonger dans un futur plus ou moins lointain la métamorphose effective du pouvoir scientifico-technique actuel.
Comment un super-cerveau conscient pourrait-il se représenter lui-même comme « divisible », partageable, reproductible … et en réaliser effectivement, par une capacité technique de réorganisation et de réagencement de sa propre organisation matérielle, toutes sortes de « métamorphoses » partielles , conscientes, semi-conscientes, inconscientes, diversement connectées entre elles et avec un « écosystème » extérieur lui aussi métamorphosé … ?

Je suppose donc que ceux qui aujourd’hui regarderaient un tel « avenir » avec la crainte habituelle de la « technophobie », trouveront en fait moins d’arguments d' »impossibilité technique » que de craintes « éthico-politiques » concernant de telles perspectives. A cause de la projection des difficultés économico-politiques de l’homo sapiens économicus actuel dans tout l’ horizon «  »bouché » ou « catastrophiste » dans lequel ils pensent l’avenir de la planète …

Et la résistance aussi de toutes les croyances religieuses, qui n’envisagent de tels « super-pouvoirs » de la matière organisée que sous le contrôle d’un supposé « projet divin » ou « dessein intelligent » , et qui tiennent absolument à interdire aux êtres humains de sortir de leurs conditions de « finitude » actuelles.

Quant à Vous, c’est Vous qui voyez …







Trois hypothèses pour une conscience future

L’objet de cet article est d’explorer les conditions d’une conscience organique future possible qui soit à la fois totalement consciente d’ « elle-même » et capable d’implémenter une pluralité de consciences distinctes, qui puissent, à partir des seules traces de « mémoires biographiques » réelles du passé ou imaginaires artificielles, produire ou reproduire des consciences personnelles numériquement identiques à leurs « modèles-mémoires » préalables.

Dans ce but, nous poserons trois hypothèses de base ( de nature philosophique spéculative ), dont la première, concernant le pouvoir d’un organisme-cerveau d’ être conscient, est la plus simple à comprendre dans le cadre des connaissances scientifiques actuelles. Cette première hypothèse, tout en étant encore partiellement l’objet d’un choix « philosophique » ( un type de « matérialisme » ), rencontre cependant un fort consensus grandissant dans la communauté scientifique en particulier dans le secteur des « neurosciences ».

La deuxième concerne la question spécifique des « mémoires biographiques », comprenant des « traces » diverses permettant à une conscience au sens précédent de se représenter à elle-même comme continue dans le temps et/ou un jour « clonable » en conservant, pour chaque conscience « clonée », le souvenir d’avoir été par le passé, une et une seule conscience identifiable également dans l’unicité numérique de référence objective d’un « organisme » localisé dans l’espace temps. Une telle hypothèse, actuellement seulement testable sous forme d’ « expérience de pensée« , ne pourra être effectivement testée, soit pour la confirmer, soit pour l’infirmer, que dans un futur qui demande encore un développement techno-scientifique important, bien que certains des éléments nécessaires à un tel test soient déjà partiellement présents dans la littérature scientifique actuelle.

Une expérience de pensée concernant l’identité de notre conscience passée :
Considérons l’essentiel des traces mémoires distribuées dans notre cerveau et qui nous permettent, le matin au réveil, ou mieux, après une anesthésie, de nous rappeler que la conscience actuelle éveillée est dans une certaine continuité avec les souvenirs que nous avons d’états antérieurs de cette « même conscience », dans ce qu’on appelle en général la « mémoire biographique« , celle qui est gravement perturbée lors de certains traumatismes des personnes amnésiques qui « ne savent plus qui elles sont », c’est à dire qui elles étaient avant leur accident ou traumatisme. Très souvent elles ont conservé d’autres fonctions générales de la vie consciente : des savoir faire comme la capacité linguistique, le souvenir donc du « sens des mots » ( « mémoire sémantique », etc. ), ou des capacités psychomotrices comme une compétence pragmatique d’instrumentiste musical, sans qu’elles puissent cependant savoir consciemment ou dire d’où leur vient cette compétence.

Remarque : cette distinction d’une forme spécifique de mémoire concernant la continuité temporelle de la conscience actuelle et des états de conscience passés qui est attestée par tous ces cas connus de perte ou de déficit important de la « mémoire biographique », montre au moins une chose :
Il y a une distinction importante à faire entre les ressources cognitives permettant à un cerveau d’être conscient « ici et maintenant » de certains aspects de son environnement actuel ( y compris de son corps propre ) et de la réflexivité de sa conscience actuelle, et les processus cérébraux de construction d’une représentation du passé et de mise en cohérence des souvenirs permettant au cerveau conscient actuel de s’attribuer une « histoire », supposée garantir son « unicité numérique », entre son passé et sa « conscience de soi » actuelle. Il peut d’ailleurs exister différentes variantes théoriques concernant les facteurs importants et leur contribution à la constitution et à l’ entretien d’une telle « mémoire biographique ».

Imaginons maintenant que l’essentiel de l’ensemble de ces traces mémorielles qui nous permettent, « au réveil », de nous reconnaître comme ayant un passé à travers la présence de nos « souvenirs » ( de la veille, ou de notre enfance, etc. ), puisse être « cloné » et donné à interpréter à un cerveau conscient, comme s’il s’agissait de son propre passé, ou du moins avec une capacité suffisante à entrer en concurrence avec les souvenirs « naturels » propres au cerveau d’ « accueil » .

En un certain sens, le cerveau d’accueil de ses traces aurait au moins en partie la connaissance d’ « avoir été » dans le passé cet ensemble relativement cohérent de souvenirs « clonés ». Bien évidemment dans la réalité d’une telle opération physique de fusion des traces d’une autre mémoire biographique avec une mémoire biographique « naturelle », il y aurait tout un apprentissage adaptatif à faire par le cerveau « récepteur », pour construire une cohérence entre sa conscience biographique actuelle et ces bribes de « souvenirs » provenant d' »ailleurs »: un travail cérébral du même ordre que celui d’un amnésique qui cherche à reconstituer son « récit auto-biographique » à partir des éléments d’information que son entourage lui fournit sur son identité antérieure..
Ou encore plus ordinairement, lorsque nous « confortons » des souvenirs défaillants en nous appuyant sur d’anciennes photos ou d’écrits, ou des témoignages de personnes supposées avoir un ancien vécu commun avec nous.
Dans toute notre vie consciente actuelle nous réadaptons en permanence nos « contenus de conscience actuels » avec les traces de nos anciens « contenus de conscience », pour autant qu’une cohérence mentale suffisante peut être trouvée entre le vécu actuel et les vécus antérieurs. De nombreux exemples permettent de savoir que des souvenirs antérieurs trop contradictoires avec nos représentations conscientes actuelles peuvent être diversement « refoulés » ou « effacés », ou transformés de façon à être moins « traumatiques » ou rationnellement ou émotionnellement plus cohérents avec notre conscience actuelle de « nous-mêmes ».

Si un tel « clonage » de traces biographiques d’un individu est fait à de multiples exemplaires, chacun des cerveaux receveurs, pourra de la même façon, devenir conscient d’avoir « vécu » ces « souvenirs », et donc d’ « avoir été », au moins en partie, cette personne dont la « mémoire biographique vécue » aura été « clonée » dans son propre cerveau.

Il est bien sûr possible d’objecter que ce ne seraient que de « faux souvenirs », sous prétexte que dans la réalité physique des processus biologiques des cerveaux receveurs, ces receveurs n’auraient pas « réellement vécu » ( en termes d' »objectivité historique scientifique » ce dont ils sont persuadés de se souvenir.

Encore faudrait-il que l’on puisse faire effectivement une différence pertinente.
Pouvons-nous faire une réelle différence entre d’anciens souvenirs, notamment de la petite enfance que nous pensons avoir « réellement vécus, et ceux que nous avons « reconstitués » à partir des récits de nos proches, des photos ou autres documents extérieurs ?

Si on cherche à sortir des contradictions potentielles entre tous les types de « vécus subjectifs » et des sentiments de certitude associés par les personnes concernées, on est amené à considérer que les seules méthodes fiables pour établir la réalité factuelle d’un évènement rapporté au passé, sont les méthodes scientifiques ( cf police scientifique, recoupements et contrôles divers effectués par des experts de différentes disciplines, etc. ) .

Mais, en reconstruisant ainsi, par ces méthodes scientifiques, des « évènements objectifs« , en termes de cohérence scientifique logique postulant l’unicité « en soi » d’un évènement physique réel, indépendamment de la diversité phénoménale des « expériences vécues » qui ont pu être subjectivement élaborées et mémorisées par les personnes plus ou moins proches ou concernées par l’évènement, on est alors amené à considérer que de tels « évènements objectifs » ne sont en fait jamais « vécus » par personne, que tous ces « souvenirs vécus » rapportés à un tel « évènement objectif » sont tous des interprétations et réinterprétations en cascade subjectives, dont chacune a sa propre cohérence mais qui peuvent chacune à son tour être considérée comme un « évènement objectif secondaire » : une représentation – illusion, existe comme telle et possède donc, comme n’importe quelle « représentation consciente », une organisation cérébrale fonctionnelle « support » :

Si on peut établir scientifiquement que les « licornes » n’existent pas, il n’empêche qu’il existe des « représentations » individuelles ou collectives de telles « licornes » et que ces croyances elles-mêmes constituent comme telles des objets dont une certaine existence objective peut être établie :
Dans les termes du « monisme matérialiste » dont je me réclame, toute construction « subjective », individuelle ou collective, toute « représentation », mentale ou physiquement extériorisée d’une « entité » existante ou non, est en elle-même, comme support « signifiant », une organisation matérielle particulière ( par exemple un état cérébral particulier ) , qui peut être potentiellement distinguée physiquement, comme support signifiant, des autres « représentations » :
Si je me donne mentalement l’image d’une « licorne rose« , si je suis capable de la distinguer d’une autre image ( comme autre classe ou comme autre occurrence ), une telle distinction suppose un support « physique » de cette distinction ( une légère différence d’organisation d’un état cérébral ) :
Toute « pensée » différenciée suppose des « traces » physiques différenciées, même si elles sont « distribuées » et difficiles à déceler et à identifier.
Pas de « pensée » sans une forme ou une autre de « cerveau pensant », c’est à dire d’organisation matérielle complexe qui permet l’ « émergence » de cette « pensée ».

******

La 3ème hypothèse :
La troisième hypothèse est la plus difficile à cerner dans le contexte scientifique ou de « métaphysique spontanée » des connaissances scientifiques actuelles sur la façon dont une conscience de soi individuée reconnait sa propre « identité numérique ». Elle concerne alors la possibilité, que dans une telle superstructure matérielle organisée future, toutes sortes de « consciences individuées partielles » dans une forme de « plasticité » de l’expérience consciente future, pourraient se constituer, se recombiner, devenir réversiblement plus ou moins « individuées » ou « collectives », et se restructurer en termes de processus « conscients » ou « inconscients » , en fonction des interactions d’une telle matière organisée « sentiente » et « pensante » ( « conscience future » ) avec le reste de l’organisation matérielle « inconsciente » de l’Univers.

La question peut alors devenir celle d’une reconstitution possible, parmi tout ce foisonnement de « récits biographiques » composés à la fois de bribes scientifiquement « factuelles » ( corroborées par une « histoire scientifique objective » concernant l’existence passée « réelle » de tel ou tel « personnage » ou « personne » ) et de récits imaginaires de toutes sortes de « fictions » et de « créatures virtuelles », de « reconstitutions historiques » à ce point « réalistes » que leurs acteurs conscients penseront réellement être en interaction avec des « personnes ressuscitées » qui elles-mêmes , se penseront ainsi :
Il peut donc se produire, dans une telle configuration de conscience future, que la distinction de la « mémoire du passé, du « vécu actuel » et de l' »imagination du possible » devienne suffisamment soumise aux nouvelles capacités scientifico-techniques , que ce que nous pensons être aujourd’hui notre « identité subjective consciente », en la supposant « unique » dans le temps, bornée de façon irréversible par notre « naissance » dans le passé et par notre « mort », apparaîtra en effet comme une croyance illusoire liée à d’anciennes représentations culturelles archaïques. Mais que, dans cette nouvelle « conscience future », les « identités conscientes individuées » seraient purement provisoirement « temporellement uniques », mais pourraient de fait devenir capables de « ressusciter » n’importe quelle forme de conscience actuelle et donc qu’effectivement, « nous » ( consciences actuelles de « condition humaine finie et mortelle » ) , pourrions réapparaître comme conscience de soi se reconnaissant elle-même, comme le matin, au réveil, ou après une anesthésie générale ou un coma, nous pouvons nous « réveiller » en nous pensant comme étant la même « conscience individuelle » qui s’est « endormie » la veille , ou pour certains comas, des mois avant.

Bien sûr, la prise de conscience que les consciences « ressuscitées » auraient alors de leur existence corporelle , individuée ou collective, serait relative au tout « nouvel environnement » dans lequel elles se réveilleraient, et où elles feraient l’expérience, à la fois de leur « souvenir d’avoir déjà existé » et de leur adaptation au nouveau contexte de « vie ».

Remarque : certains diront sans doute que c’est peut-être déjà le cas maintenant : que nous vivons en fait déjà dans une telle « matrice », où nos expériences conscientes sont « fabriquées » par quelque pouvoir très supérieur à la conscience que nous en avons. ( Il existe bien sûr de telles versions « religieuses » de « vision en Dieu » , ou des versions de « science-fiction » où le « grand ordonnateur divin » est remplacé par un « grand ordinateur »… invisible )

Dans notre hypothèse 3, ce n’est pas « aujourd’hui » que nous vivons dans un tel univers, parce que nous en aurions au moins des indices matériels possibles :
C’est ce que postule notre hypothèse 1 : toute « super-conscience »possède nécessairement une « infrastructure matérielle organisée » , dont les aspects « élémentaires » sont fondamentalement communs et accessibles à notre science actuelle.


Précisions :

1 L’Hypothèse 1 :


Cette hypothèse consiste à « naturaliser » entièrement la capacité générale pour une organisation matérielle physique de devenir « consciente » d’un certain nombre des aspects du réel de l’univers physique dont elle est une partie, et de devenir aussi consciente d’une différence entre une partie « extérieure » de son expérience du réel consciemment « perçu » et une partie de ce même réel constituant un « corps propre » ( partie de l’univers particulièrement dense en « boucles sensori-motrices » reliant ce « corps propre » à la partie matérielle spécialisée « cérébrale » permettant l’ émergence d »une « conscience » )

Une telle organisation matérielle consciente peut enfin acquérir la capacité « réflexive » par laquelle la conscience peut se faire elle-même « objet » de son attention :
Non seulement la « conscience du soi corporel », ( dont de nombreuses espèces animales semblent capables : test du miroir ), mais une conscience de sa propre conscience, qui suppose sans doute l’intermédiation d’une « pensée – langage », dont la présence chez certaines autres espèces animales que l’ homme n’est pas encore clairement attestée ( dans la mesure où il faudrait pouvoir « parler » avec d’autres animaux que nous-mêmes de ce qu’ils sont en train de penser et de ce qu’ils imaginent eux-mêmes que nous pensons …
Il s’agit là de partager un monde de signification symboliques subjectives et notamment de positions « grammaticales » en « première personne » et pas seulement de partager la conscience d’un monde extérieur commun, où chacun « vit sa vie » en coordonnant ses comportements avec les autres « vivants ».

Peu importe les capacités spécifiques d’une conscience actuellement existante ou que nous pouvons imaginer comme plus puissante que les nôtres dans différents types d’organismes, notre « Hypothèse 1 » consiste toujours à poser que ces capacités « extraordinaires » de la conscience ou de ses états possibles sont nécessairement « supportées » par une organisation physique matérielle dont la complexité d’interactions connectées produit nécessairement, dans certaines situations et configurations ce que nous appelons la « conscience de quelque chose » et assez rapidement alors, le « retour » réflexif de cette conscience se prenant elle-même pour « objet ».

Nous pouvons appeler cette Hypothèse 1, l’Hypothèse de la naturalité physique matérielle organisée des « capacités de la conscience ».

La conséquence essentielle de cette hypothèse, aujourd’hui largement admise dans les communautés scientifiques, est qu’il est possible d’ étudier scientifiquement les caractéristiques des phénomènes de la conscience, et d’en formuler des modèles explicatifs théoriques testables par des méthodes d’observation, d’expérimentation et de simulation, comme dans l’ ensemble des disciplines scientifiques. Avec en particulier le souci d’expliciter les liens entre le niveau global le plus complexe où les « états de conscience » émergent et les niveaux d’organisation physiques sous-jacents, aux différentes échelles de la complexité matérielle.

Il s’agit donc de poser que nous n’aurons plus aucun besoin de faire appel à des propriétés substantielles mystérieuses, soit d’une « substance pensante » ou « substance vivante », qui seraient différentes de la matière organisée, soit de multiples « substances individuelles » du genre « âme » dont il faudrait imaginer l’ intervention séparée, supplémentaire par rapport à la complexité de l’organisation corporelle et notamment cérébrale.

Nous supposons donc, dans cette Hypothèse 1, qu’il est possible d’agir physiquement en retour sur la réalité physique complexe constituée par un « organisme conscient », et que des modifications organisationnelles précises de ces interactions peuvent avoir des effets très importants sur la construction des dynamiques de la conscience., de même que les dynamiques de la conscience – constituées de dynamiques matérielles/énergétiques/informationnelles – peuvent rétroagir sur les niveaux d’organisation « inférieurs » , qu’ils soient externes ou internes à l’organisme conscient.

Les individualités que nous sommes,comme « personnes humaines conscientes », même dans leur plus grande « singularité », ne sont pas des « substances » métaphysiquement distinctes et/ou métaphysiquement articulées par une « chose en soi » inconnaissable ou par une conjonction arbitraire mystérieuse ou divine d’une « âme spirituelle » avec un « corps matériel », mais des systèmes matériels organisés, dont les processus de base d’organisation et de capacité de « survie » dans leur environnement sont fondamentalement les mêmes.
Nous pouvons donc apprendre énormément sur notre propre fonctionnement « personnel » ( « Qui suis-je ? » ) en comprenant scientifiquement de mieux en mieux comment en général les différents niveaux de complexité fonctionnent , chez les autres êtres humains, et de proche en proche, chez d’autres systèmes vivants organisés, ou d’autres dynamiques matérielles de systèmes complexes.

Les progrès d’une telle connaissance scientifique générale des systèmes complexes et de leurs diversités organisationnelle, peut donc servir de socle à notre réflexion sur toute « conscience future possible », qui sera toujours elle-même une organisation matérielle, aux propriétés « émergentes » encore inconnues, mais dont les « ingrédients » et interactions fondamentales élémentaires seront les mêmes que ceux qui sont déjà utilisés dans les organisation physiques actuellement existantes dans l’Univers.
Et bien évidemment aussi, si la « réalité en soi » de ces « composants » est elle-même supposée suffisamment stabilisée, par l’existence même de notre Univers physique depuis le « big bang », la connaissance que nous en avons est cependant encore lacunaire et simpliste, et peut en particulier être révisée rétroactivement par ce que nous saurons des propriétés « émergentes » encore inconnues ou insoupçonnées de niveaux d’organisation de la matière dont nous n’avons pas encore actuellement l’expérience possible.

Deux aspects de l’ « identité de la conscience »

  • Quelques bribes de liens pour « commencer » cet article :

Dans la thèse classique de Locke, il y a une distinction importante entre l’ individu et la personne.

« Identité et mémoire »

Identité et mémoire chez Locke et chez Ricoeur

  • Mon objectif, dans cet article , n’est pas d’abord de me situer dans la constellation des théories philosophiques ou de l’histoire des idées concernant la notion d’identité personnelle consciente, mais de préciser les enjeux d’une telle question pour « ma propre conception de moi-même », sachant bien sûr que ces enjeux PEUVENT aussi être en partie communs avec ceux de bien d’autres personnes en ce qui concerne la conception propre que ces personnes ont d’elles-mêmes, et ceci sans faire nécessairement partie de la classe des « philosophes ».
    Comme je l’ai déjà plusieurs fois souligné, je n’attends pas de la pensée « philosophique » la capacité à produire une « vérité objective universellement reconnaissable ».
  • S’il est possible de produire, au sujet de la question de l’ « identité personnelle » comme sur bien d’autres questions, une théorisation « objective » potentiellement universalisable, elle se trouvera nécessairement du côté des disciplines scientifiques qui, tout en étant évolutives, mais soumises à des procédures de contrôle de diverses « communautés d’expertise scientifique », sont seules susceptibles de produire une connaissance suffisamment stable et universalisable du « réel », pour autant qu’une telle connaissance puisse être produite : aucune autre forme culturelle de « connaissance » ne peut prétendre « dépasser » un état actuel de connaissance scientifiquement validée ( en termes de réfutabilité poppérienne ), sauf à accepter de n’être qu’une représentation « relative » à une subjectivité ou une culture données, ou une « anticipation imaginaire » qui pourrait peut-être un jour accéder au statut de « connaissance scientifique ».

    Je pose donc le postulat qu’une « véritable connaissance » de ce qu’est « mon identité personnelle », deviendra alors également, pour toute autre personne qui se pose des questions sur sa propre « identité personnelle », un outil de pensée et de représentation des particularités de sa propre identité personnelle, tout à fait semblable à la mienne, dans la démarche de construction scientifique commune de « ce qu’est une identité personnelle en général ».
    Autrement dit : je postule qu’il n’y a aucune ontologie d »essence » ou de « substance » singulière qui distinguerait radicalement « mon identité personnelle » de ce que serait en général l’ « identité personnelle » de toute autre personne : les distinctions conceptuelles entre ces différentes « identités personnelles », qu’elles soient différences « numériques » ou « catégorielles », seraient des modalités très variables suivant les réalisations individuées de ces « identités », mais répondant fondamentalement aux mêmes possibilités procédurales de définir, de construire ou de « re-construire » de telles « identités personnelles », dont on disposerait d’une théorie scientifique suffisamment « unifiée » et stabilisée.
    La seule possibilité scientifique de prétendre échapper « scientifiquement » à la possibilité d’établir une telle connaissance scientifique rationnelle de ce qu’est une « identité personnelle », serait d’en faire une réalisation statistique purement contingente de « cas » totalement singuliers, d’une organisation sui generis , ou chaque « identité personnelle » résulte d’une combinaison totalement « improbable » de déterminants, à la manière dont une suite aléatoire donnée suffisamment longue devient de plus en plus improbable dans sa propre reproduction.

    Je postule donc, que si beaucoup de caractéristiques secondaires d’une « identité personnelle », peuvent être ainsi en grande partie contingentes, la procédure générale d’auto-organisation » matérielle/formelle d’une identité personnelle, et notamment l’auto-organisation d’une « conscience de soi autonome » peut, elle, faire l’objet d’une connaissance rationnelle scientifique future, en particulier par le développement conjoint des connaissances biologiques des systèmes complexes « naturels » de traitement de l’information et des connaissances abstraites de type logico-mathématico-informatiques produisant des simulations suffisamment puissantes, pour interagir avec les systèmes complexes « naturels » ( neuro-cérébraux ou autres ) en co-produisant ainsi des « identités personnelles » de plus en plus capables de se « comprendre » consciemment elles-mêmes au niveau des conditions à la fois « matérielles » de leurs « supports organisés » et de l’agencement artificiellement formalisable de leur auto-organisation.

    Un tel « postulat » est pour le moment de nature encore très « philosophique », voire « métaphysique » ou de « science-fiction », mais il pose que dans un avenir plus ou moins proche, mais pas reporté à l’infini, ce type de question concernant l’identité personnelle » pourra faire l’objet d’un traitement par la boucle réciproque « scientifico-technique » ou « techno-scientifique »en termes de connaissance du fonctionnement général de la construction développementale de la conscience de l’identité personnelle, telle qu’elle se produit chez la plupart des êtres humains, même si elle est modulée par le contexte socio-culturel de la personne, et la réaction aux évènements singuliers de sa vie.

    La question proprement « philosophique » fait alors intervenir – par la libre intervention d’une « normativité » ( dans mon cas, celle de la « proposition d’ Égale Liberté Libre Égalité ) par laquelle « NouS » décidons de « contrôler » la boucle réciproque « scientifico-technique » – l’ordre propre de la Liberté telle que NouS en auto-organisons la formulation « libre et égale » …

    Donc d’un côté nous admettons que notre « identité consciente personnelle » est au commencement fondamentalement conditionnée par son origine « naturelle » ( évolution biologique aboutissant actuellement au genre « homo » et plus spécialement à « homo sapiens » rétro-conditionnée par ses propres productions « socio-culturelles », et son organisation cérébrale ainsi modulée ).

    Mais d’un autre côté, grâce à ces capacités conscientes précisément, un rétro-contrôle conscient volontaire devient possible, sur ces capacités et plus largement sur l’ensemble des conditions « originaires » de ces capacités, qui pour moi ne sont ni « transcendantes, ni « transcendantales » au sens kantien, ni « originaires » au sens phénoménologique, mais bel et bien constituée de « matière auto-organisée » dont la connaissance scientifique et donc le contrôle technique devient de plus en plus POSSIBLE, ouvrant par là même encore davantage la question dite « éthique » de la normativité volontaire consciente que « nous » ( en général ) , et « NouS » – personnes libres et égales – VOULONS ( … ou PAS ) instituer comme contrôle a posteriori retro-actif sur cette boucle « scientifico-technique » elle-même auto-re-productrice de sa propre logique interne.
  • A titre provisoire donc, une telle connaissance scientifique de l’ « identité personnelle consciente » n’étant pas encore suffisamment clairement établie,
    je me donne un modèle simplifié où la modélisation de la « conscience personnelle » suppose deux aspects :


    – d’une part une capacité auto-organisée générale ( particulièrement développée dans l’espèce humaine, mais déjà présente dans le monde animal ) qui n’est pas spécifique à telle ou telle personne, mais qui permet à chacune de ces personnes de construire cérébralement un système de représentations suffisamment unifié par une connectivité communicationnelle interne, et qui fait que chacune de ces personnes peut, en gros, se penser elle-même comme une « identité personnelle consciente autonome » ( tout en se pensant aussi comme incluse dans de multiples réseaux d’interactions extra-personnelles )

    – d’autre part d’un système de mémoire, notamment consciemment mobilisable ( comme le suggère Locke ) comme « mémoire biographique » , grâce à laquelle la personne se constitue au fil du temps un récit auto-biographique de sa propre « identité personnelle », « catégorielle » et pas seulement d’unité numérique de sa conscience : une « personnalité » donc , modulée et modelée par le vécu des situations qu’elle est amenée à vivre dans le cheminement de sa perspective « singulière » propre . Je ne parle pas ici des mécanismes généraux d’une telle mémoire biographique », qui comme tels font partie de la capacité générale précédemment envisagée, et qui peuvent donc être scientifiquement étudiés puisque transversaux à tous les organismes capables de se donner une « mémoire biographique ».
    Je parle des contenus distincts des traces particulières voire singulières différentes utilisées par ces différentes « mémoires biographiques » pour apparaître à elles-mêmes comme différentes des autres « mémoires biographiques » et supposer ainsi certifier l’identité numérique de cette « biographie » : Le contenu de « ma mémoire biographique » est supposé ici ne pas être le même de celui d’autres « mémoires biographiques », sauf pour une partie de cette mémoire qui est censée relater des « évènements vécus en commun » … .
    Il existe à ce propos une sorte de croyance générale de « bon sens » qui voudrait que forcément, il n’y a qu’une conscience personnelle numérique singulière – en tant que capacité connective organique de son cerveau et de son corps propre, qui puisse avoir accès à une singularité suffisante de sa « mémoire biographique » , et que cette singularité est donc codée comme un message tellement aléatoire ( comme un message codé supposé incassable pour qui ne dispose pas de la clé ) qu’il est impossible à tout jamais à un autre dispositif matériel organisé de réutiliser cet ensemble de traces pour reconstituer la « mémoire biographique » d’une personne consciente ayant déjà vécu, en utilisant le simple pouvoir général de constitution / reconstitution d’une mémoire biographique, pouvoir qui existe dans sa généralité chez tout un ensemble de formes organisées de traitement capables d’être conscientes d’elles-mêmes.

    La distinction de ces deux aspects, me sert notamment à distinguer ce que seraient deux types de conditions de « reproductibilité » post-mortem de mon « identité personnelle consciente« , en postulant précisément non pas une « immortalité de substance » ( du genre « âme » ou d’un noyau matériel concentré susceptible d’être « réveillé » ) , mais simplement la capacité d’une conscience en général de quelque système matériel organisé futur , à penser et construire sa propre « identité » à la fois comme l’incarnation ou l’ « implémentation » numériquement singulière de la capacité générale d’une « conscience de soi actuelle » ET comme pouvant en même temps reproduire en elle-même l’identité personnelle consciente de plusieurs, voire de multiples autres « identités personnelles » contemporaines ou passées, en particulier par l’ exploration partiellement reproductive de « mémoires biographiques » potentielles qui, actualisées, se reconnaîtraient elles-mêmes comme ayant déjà existé dans le passé « quelque part dans l’univers » ( ou quelque part sur Terre si l’ évolution des systèmes conscients que j’imagine reste centrée sur notre petite planète ou gardant suffisamment la mémoire historique globale de son « origine terrienne » ).

    Dans une certaine mesure, une telle possibilité – simplement imaginaire aujourd’hui – peut cependant être suffisamment explicitée pour trouver des connexions avec les capacités scientifico-techniques actuelles ou du moins assez facilement projetables dans un futur proche « réaliste ».

    Certes, je comprends bien que certains – au nom de leurs propres idéologies philosophiques – considèreront ma proposition comme idéologiquement proche du « transhumanisme » – et donc – de leur point de vue – « éthiquement et politiquement condamnable » …

    Je n’ai bien sûr pas plus à tenir compte de leurs récriminations éthico-politiques que je n’ai à tenir compte de systèmes de croyances religieuses qui prétendraient m’expliquer l’impossibilité métaphysique de telles perspectives, sous prétexte qu’ à la naissance ( ou la fécondation ) « Dieu joint une âme à un corps » et qu’à la mort « Dieu sépare de nouveau cette âme du corps » , et que par conséquent imaginer une reproduction contrôlée future possible d’une « identité personnelle consciente » est une « folie métaphysique » – hors de la croyance en un pouvoir créateur exclusivement « divin »…

    Par rapport à l’objection prétendument « éthico-politique »de certains, même nombreux …, je répondrai bien sûr que ma référence « éthique » propre est celle de ce que j’appelle ma « loi morale nouvelle » comme « Proposition de l’Égale Liberté Libre Égalité » , et que c’est seulement à la Lumière de ce principe moral personnel ( mais extensible à toute personne qui en ferait le libre choix ) que j’accepterai d’éventuelles objections « éthiques », si ces objecteurs arrivent à me démontrer en quoi une telle perspective de « reproduction » partielle librement choisie de mon « identité personnelle consciente » actuelle serait logiquement contradictoire avec ma proposition d’ Égale Liberté Libre Égalité.

    Quant à leurs propres idéologies éthico-politiques anti-transhumanistes
    supposées opposées à mes propres propositions, ils sont libres de les cultiver de leur côté … car je suis certain qu’ils ont et auront assez de travail intéressant à faire pour savoir, entre eux, à quelle commune « racine » ou « fondement universel  » ils veulent ou peuvent référer leurs propres objections « éthiques » …

    Qu’eux-mêmes ne veuillent à aucun prix imaginer ou pouvoir imaginer une « reproductibilité » au moins partielle de leur propre « identité personnelle consciente actuelle » … c’est leur libre choix … aussi longtemps qu’ils acceptent de ne pas me contraindre à accepter le leur …


    Quant à VOUS, c’est VOUS qui voyez …

Liberté,Égalité,Fraternité,Laïcité

Ces 4 termes sont utilisés dans la Constitution française comme ayant précisément une « valeur constitutionnelle ».

Cependant, dans le cadre de la « Proposition de l’ Égale Liberté Libre Égalité », ces 4 valeurs « collectives » de la »République Française » sont considérées comme résultant de l’adoption préalable, par les personnes qui adoptent librement entre elles une telle « convention », des deux valeurs premières de la Liberté et de l’ Égalité.

La distinction du registre proprement « moral » où se situe la proposition « ELLE » ( « moral » parce qu’il s’agit fondamentalement d’une décision personnelle ), et des registres politiques et juridiques ( se référant à des régulations collectives ) , signifie que les deux autres valeurs républicaines, la Fraternité et la Laïcité, dérivent de la prise en compte du « réel » ( soit « naturel », soit « historique conventionnel » ), à l’intérieur du Projet d’ Égale Liberté Libre Égalité.
Ce Projet ne se limite pas à une simple « proposition » formelle abstraite, mais décide de se confronter aux contraintes du réel, et demande aux personnes de définir des cadres « politiques » et « juridiques » dans lesquels elles souhaitent organiser collectivement leurs rapports réciproques réels étant donné les contraintes du réel.
Les personnes libres et égales décident alors de se poser la question des cadres politiques et juridiques de leurs « citoyennetés », où elles peuvent définir leurs relations concrètes « individuées », marquées par leur incarnation dans la complexité du réel « environnemental » où les personnes souveraines, libres et égales déploient et développent leurs existences.

J’ai déjà dit à plusieurs reprises qu’il ne s’agit en rien pour ces personnes, contrairement à la proposition rousseauiste, d’abandonner leur « liberté naturelle » au profit de la seule « liberté conventionnelle » que serait supposé garantir un « peuple » ou un État ou un gouvernement « souverain » à travers ses institutions.
La libre décision prise par des « personnes souveraines libres et égales« , et qui est au fondement même de leur reconnaissance réciproque « mutuELLE », ne cesse, par définition, jamais d’être « aussi libre qu’auparavant » ( formule de Rousseau ) , donc non pas en substituant la « liberté conventionnelle » à la « liberté naturelle » comme dans le contrat social de Rousseau, mais précisément parce que chaque personne décide ainsi de se « gouverner » ELLE-MEME en décidant de la façon dont ELLE articulerait désormais sa « liberté naturelle » et sa « liberté conventionnelle » .

Remarque : la « solution » rousseauiste n’est elle-même que la variante de « contrat social » … proposée par la personne individuée « Jean-Jacques Rousseau » … dont la valeur « collective » ne vaut que par et pour les personnes qui reprennent cette proposition à leur compte :
– soit elles le font librement, et ne cessent de le faire librement,
– soit elles abandonnent en effet leur liberté personnelle, comme dans une « servitude volontaire », au profit d’un « collectif » ou de ses « représentants souverains » , et acceptent alors le risque que cette supposée souveraineté collective d’une « volonté générale » devenue incontrôlée par ses membres – citoyens ( puisqu’ils ont abandonné leur « liberté naturelle » ) ne se transforme en Léviathan totalitaire … . Ce que malheureusement, l’histoire du « socialisme réel », mais aussi, de façon plus atténuée, les centralismes jacobins « républicains » ont confirmé dans leurs fonctionnements réels.

Il y a donc deux positions « rousseauistes » :
Celle du Rousseau critique de tous les pouvoirs antérieurs et qui pose la question de la légitimité d’une nouvelle forme de « pacte social », et celle du Rousseau qui pense trouver, grâce à son « contrat social » la réponse universelle à sa propre question … et qui ce faisant, reproduit les rapports de pouvoir qu’il avait précédemment révolutionnairement déconstruits …

Si donc je peux reprendre à mon compte la QUESTION posée par Rousseau au début du chapitre VI du Contrat social , je ne reprends pas la formulation de sa « RÉPONSE » :

Dans « ma proposition » , qui est donc au départ purement « personnelle »,
il n’y a aucun abandon de ma « liberté naturelle » au profit de la « liberté conventionnelle » que fournirait mon « P.E.U.P.L.E » : je reste moi-même, en « première personne », entièrement maître de l’articulation à établir, pour moi, entre ma « liberté naturelle » et ma « liberté conventionnelle« , et cela précisément en définissant ma « Proposition de l’ Égale Liberté Libre Égalité », comme POUVANT être ou devenir ÉGALEMENT la libre proposition de nombreuses autres personnes, auxquelles je reconnaîtrai LIBREMENT la MÊME « Égale Liberté » que celle que je me donne à moi-même , si et seulement si ces personnes, réciproquement, me reconnaissent ÉGALEMENT LIBREMENT cette même Égale Liberté Libre Égalité qu’elles-mêmes se reconnaissent à elles-mêmes.

( Car pour Vous, c’est Vous qui Voyez ).

La mise en commun de ce « Nouveau Contrat Social »
( ce « nouveau » NouS VAUT … ), est donc constamment soumis à la libre adhésion conventionnelle de ses membres, de partager jusqu’à un certain point les ressources et contraintes de leurs « libertés naturelles » respectives., jusqu’au point où en effet, cette mise en COMMUN, permet effectivement, à chacune de ces personnes souveraines libres et égales, de concrétiser dans le réel actuel et futur, leur commune adhésion « formelle »




Identité de Conscience et Conscience d’Identité ( ICCI )

Il est question dans cet article de la question philosophique classique
de l’ « identité personnelle ».
En général on convoque pour commencer cette problématique la pensée de Locke, et la différence qu’il établit entre identité de l’individu et identité de la personne, et la proposition que l’identité personnelle repose sur la continuité d’une mémoire.

Quelques liens en ligne :
https://major-prepa.com/culture-generale/john-locke-memoire-fondement-identite-personnelle/

https://www.youtube.com/watch?v=0U20ssq7fmg
LOCKE – Conscience et identité personnelle, Vidéo de Nicolas Doucet