https://www.newyorker.com/magazine/2017/03/27/daniel-dennetts-science-of-the-soul
Catégorie : matérialisme émergentiste
Mes Moires Imaginaires
La mythologie des Trois Moires plonge bien sûr dans les profondeurs archaïques d’un supposé “Destin” qui déterminerait le “fil” de chaque vie, depuis la “naissance” jusqu’à la “mort”.
Bien évidemment, il est difficile de démêler dans ces fils, la part de réelles déterminations scientifiquement référençables, mais qui déjà, à cause de la complexité même des processus d’organisation de la matière aux différentes échelles peuvent difficilement être prévisibles en dehors d’un espace de probabilités statistiques, et la part de significations imaginaires et symboliques qui se filent ou se tissent avec ces déterminations réelles en formant toutes sortes de motifs enchevêtrés où nous projetons nos détecteurs de “figures” plus ou moins étranges ou familières à reconnaître.
L’émergence de la liberté, et de sa libre récursivité, en reprenant sans cesse ces brins tissés dans le “passé” ( personnel, humain historique, évolutif vivant et cosmologique ), reconfigure dans l’épaisseur d’un “présent” auto-organisateur, les probabilités des configurations futures.
Au carrefour des bifurcations du “présent”, nous ne savons pas tout ce qui peut devenir en jour possible, là où, comme on dit quelquefois, la “réalité dépasse la fiction”.
En particulier, les conditions physiques organisationnelles actuelles de l’ émergence de notre “conscience” humaine individuée, ne sont pas nécessairement éternellement les mêmes que celles qui ont présidé à l’ évolution biologique des structures cérébrales humaines actuelles.
Rien ne nous contraint à penser que la “solitude métaphysique” d’une conscience individuelle “mortelle” dans laquelle beaucoup d’humains actuels pensent leur “finitude”, échappe nécessairement à notre pouvoir de transformation du réel, et que d’innombrables formes de “consciences futures” sont pensables, sur la base de toutes sortes de “complexification” de l’organisation de la matière. Formes d’organisation où, même “morts” aujourd’hui, notre “conscience personnelle” dans et par laquelle nous identifions aujourd’hui notre existence peut parfaitement se “réveiller” ( comme dans la “Métamorphose” de Kafka ) en se reconnaissant elle-même comme ayant déjà existé, tout en étant simultanément un état ou une structure fonctionnelle d’une telle “conscience future” :
Rien ne contraint de telles “consciences futures” plus complexes que celles que nous connaissons aujourd’hui, à se limiter a priori à une “conscience de soi” exclusive, excluant que cette conscience puisse être “en même temps” fonctionnellement partagée avec toutes sortes de consciences distinctes mais “connectables” dans une expérience de “conscience de soi” partagée, soit contemporaines, soit ayant existé dans le passé, et qui donc se “réveilleraient”, à la manière dont nous-mêmes aujourd’hui “reprenons conscience” après le sommeil ou une anesthésie ou un coma.
Jusqu’à présent, dans nos cultures, une telle perspective était réservée à une croyance religieuse, tant il fallait pour l’imaginer, se référer à des “pouvoirs divins” transcendants que nous pouvions difficilement penser comme “humainement” accessibles.
Mais dans la perspective strictement moniste matérialiste évolutionniste émergentiste qui est la nôtre, comprenant notamment toute “conscience” et donc aussi “conscience de soi” comme résultant d’un fonctionnement hautement complexe de la matière organisée, et en aucun cas comme constituant une “substance” mystérieuse qui viendrait s’ajouter de façon incompréhensible à une “substance matérielle” pensée comme simple et passive, rien n’exclut l’émergence de nouvelles propriétés encore plus inattendues de la matière organisée, et notamment si celle-ci inclut en retour les effets spécifiques de l’ “autonomie de la volonté” progressivement acquise lors de l’ évolution et de l’histoire culturelle humaine.
Dans un but de simple exploration “artistique” ( où “Esth-ELLE” prends quelquefois les traits fictifs de “Kate Astrophe” ), nous pouvons donner libre cours aux échanges avec les algorithmes de “Midjourney”, pour donner “chair” aux fictions oniriques d’une future “connectivité” organo-cérébrale généralisée tissant toutes sortes de “morphogénèses”.
On y reconnaîtra peut-être aussi les inséminations du moule-patron , d’un personnage du Jardin des Délices, que j’ai souvent choisi comme avatar personnel de “Porte-Moule” , en guise de passager clandestin dans divers collages réalisés par “Kate Astrophe”
Le “porte-moule” dans le Jardin des Délices
Remarque : Le thème général du “moulant-moulé”, de l’ “objet-dard”
( L’Etang-Dard sans gland est le V ! ), jouant aussi sur le genre de “le moule / la moule”, passant par les “Neuf moules mâliques” également de Duchamp,
a été également, en son temps ( printemps été 2005 ), l’une des thématiques composantes de la fameuse “Instabullation Pasiphiste” “De l’ Art d’escalader l’Everest“, orchestrée par Vincent Cordebard en Mai-Juin 2005, au sein de l’ équipe des “Quip’s” de l’ Araignée Quipudep …
Autre remarque impromptue et inopinée :
L’ Etang-Dard peut aussi faire allusion à la “Guêpe” du Grand-Verre , qui brandit en effet le “nuage” de la Mariée comme un “étendard” …
Les “célibataires” sont-ils terrifiés par le Venin de Vénus ?
Le supposé paradoxe de la question “Pourquoi suis-je moi ?”
Je parle ici d’une question reposée par François Galichet dans son ouvrage “Mourir délibérément ?” ( Presses Universitaires de Strasbourg mars 2014 ).
Cette question “Pourquoi suis-je moi ?” est notamment traitée au chapitre 5 de l’ouvrage , chapitre intitulé “Qui veut mourir ?“
En posant ainsi la question de l’ “identité du sujet” supposé vouloir sa propre mort.
Remarque : la question “Qui veut mourir ?” est sans doute aussi philosophiquement proche de la fameuse question posée par Jean-Luc Nancy “QUI vient après le sujet ?” .
Mais je ne traiterai pas ici de ce rapprochement.
Je constate simplement que la question “Pourquoi suis-je moi ?” est facile à poser, et est même posée par de très jeunes enfants.
Mais les philosophes qui cherchent à y répondre, soit finissent par “dégager en touche”, en prétendant qu’il s’agit d’une énigme insoluble, soit répondent en fait chacun à sa façon, à partir de leurs propres présupposés ou préjugés philosophiques.
La question posée, après d’autres … , par François Galichet,
est donc “Pourquoi suis-je moi ?”
P.110 :
“Pourquoi suis-je moi?” ne signifie pas : pourquoi suis-je ainsi, avec ces caractéristiques, ces qualités, ces propriétés […]
“Pourquoi suis-je moi?” signifie : pourquoi les suis-je, elles et non d’autres que je pourrais avoir ou être tout aussi bien ?
“TOUT AUSSI BIEN” , vraiment ?
Qu’est-ce qui permet d’affirmer avec une telle certitude apparente que le “je” en première personne qui affirme ainsi son existence “arbitraire radicale” incompréhensible, pourrait être “tout aussi bien” être le MÊME SUJET, mais avec des “caractéristiques”, des “propriétés”, des “qualités” tout à fait différentes ?
Or les catégories et concepts avec lesquels chaque philosophe, ou personne en général, pense sa propre “identité subjective“, sont :
- à la fois très générales ( propres à la structure générale du cerveau humain ou hominidé, ou … de tout organisme matériel capable de se représenter ce qu’il entend par “identité subjective” ou comme étant sa “propre identité consciente d’elle-même” ), et peuvent alors être caractérisées par différentes disciplines scientifiques qui pourraient construire un savoir interdisciplinaire sur cette question, et donc sur des explications tout à fait “empiriques” de cette conception ou perception de soi comme “arbitraire radical” :
L’organisation actuelle des circuits cérébraux humains, malgré les différences individuelles , d’apprentissage et d’éducation culturelle, révèlerait alors à la fois la capacité humaine générale de se poser se genre de question “Pourquoi suis-je moi ?”
et les raisons d’une supposée incapacité radicale ( “arbitraire radical” ) d’y répondre … qu’on pourrait alors un jour modifier en modifiant partiellement l’organisation du cerveau humain, ou en général des organisation matérielles “conscientes d’elles-mêmes”.
Cette “organisation générale” des cerveaux humains, pourrait aussi, après analyse “empirique”, montrer en quoi consiste, “empiriquement”, non pas une réelle “incapacité radicale arbitraire” à se penser elle-même, mais bien une résistance inconsciente ( ou au contraire consciemment voulue ) d’un grand nombre d’êtres humains ( … mais pas tous … ) à pouvoir ou vouloir se penser ainsi radicalement comme “personne libre et égale”, et à se soumettre “arbitrairement” à toutes sortes d’ “autorités” , réelles, imaginaires ou “symboliques”, considérées comme les authentiques “arbitres” de leur situation. ( A commencer bien sûr par le superlatif “arbitre divin” … ) - ou alors très spécifiques à chaque “penseur”, à son parcours personnel, ou liés à sa “culture” et à la façon dont cette culture , notamment philosophique, a jusque là pensé l’ “identité subjective” d’une personne, ou la sienne propre … “en toute subjectivité”
Mais ces conceptions personnelles ou culturelles extrêmement variables peuvent alors aussi être considérées comme des faits empiriques dont on peut étudier scientifiquement la distribution variée … et même aujourd’hui en révéler les traits statistiques principaux grâce à une “intelligence artificielle”.
Bien sûr, en rapportant ainsi, dans les deux cas, la perception d’un “arbitraire radical” de notre “identité subjective“, à une constitution “empirique” matériellement organisée de notre “être”, même si elle est encore inconnue, et non à une constitution “transcendantale” ou d’un “en soi” métaphysique radicalement inconnaissable, je fais moi-même un choix “philosophique”, en présupposant qu’une “réponse” en termes de connaissances scientifico-techniques et donc en ce sens “empiriques“, pourra être construite dans un avenir ouvert, si on considère qu’une telle réponse n’est pas aujourd’hui clairement formulable.
Si donc on fait l’hypothèse, à la manière de François Galichet, que “je” pourrais avoir “tout aussi bien” les caractéristiques empiriques que nous trouvons chez les “autres”, c’est affirmer d’une façon ou d’une autre la distinction, sinon la séparabilité, du noyau réflexif identitaire d’une “conscience de soi” ( donc sa capacité générale, et qui est donc présente chez toute personne qui se pose la question … , à moins de penser, en termes “solipsistes”, que cette question “radicale” n’est propre qu’à certains “esprits philosophiques” ), et de la grande variété des “contenus de pensée” possibles ( y compris ceux qui paraissent nous singulariser par rapport à d’autres )
Mais comme je l’ai dit précédemment, dans ces deux cas, et notamment en ce qui concerne le “noyau réflexif identitaire” d’une “conscience de soi” en général, je pose que rien n’empêche a priori ( sauf une croyance a priori d’une telle impossibilité de connaissance “arbitraire radicale” ) , qu’un développement scientifico-technique futur nous donne un éclairage beaucoup plus précis et efficace sur cette supposée “incapacité radicale”.
A propos donc de la distinction entre ces deux aspects, à savoir d’un noyau général d’organisation formelle de notre “conscience de soi” comme capacité, et d’un autre côté d’un contenu particulier variable et éventuellement aléatoire de cette conscience de sa propre identité,
De deux choses l’une :
A – Ou bien c’est faux : il n’y a pas de telle séparabilité radicale, c’est une pure illusion de croire une telle séparabilité du “sujet comme tel” ( comme capacité générale, y compris comme supposée identité numérique “arbitraire radicale” ) , par rapport à toutes les caractéristiques empiriques de l’organisme incarné dans un environnement qu’il est par ailleurs ( en tant que “moi empirique” ) :
D’une façon ou d’une autre il s’agit là d’une thèse dualiste, soit à a manière cartésienne d’une dualité des “substances”, soit du dualisme “empirique”/”transcendantal” ou “phénomène / noumène”, etc. à la manière kantienne, soit de l'”originaire” phénoménologique par rapport à ce qui est contenu dérivé , etc. )
Que certaines propriétés de notre organisme individuel , les plus “extérieures” , soient “accidentelles” et aléatoires, ne signifie pas nécessairement qu’elles le soient toutes, en particulier toutes celles qui définissent nos capacités d’activités mentales conscientes, nos capacités mémorielles et linguistiques, notre puissance imaginaire, etc. : toutes les capacités qui permettent en fait l’exercice de notre “pensée réflexive”, capable de “se prendre elle-même comme objet” .
Derrière une thèse d’ “arbitraire radical“, comme celle de François Galichet, on trouve en fait les thèses tout à fait classiques de type métaphysique où l’ essentiel du “sujet” connaissant est pensé ( par ce même sujet … empiriquement conditionné par sa culture ) comme lui échappant :
– soit comme pour la “res cogitans” cartésienne, parce que la pensée consciente est supposée alors totalement transparente à elle-même ( quelles que soient les erreurs possibles sur le contenu des pensées, ces pensées en tant que “claires et distinctes” sont aussi transparentes à elles-mêmes que le peut la nature même de cette conscience “cogitans“, et donc si on n’en sait pas plus, dans cette “claire conscience de soi”, c’est qu’il n’y a rien de plus à savoir, et que tout le problème ne se reporte que sur l’articulation “obscure et confuse ?” des deux substances … et/ou sur l’infinité inaccessible d’un “pouvoir divin” qui en assurerait la miraculeuse conjonction”
– soit au contraire pour le “sujet constituant” kantien, ce sujet proprement dit, comme “existant en soi“, est à proprement parler inconnaissable, puisque nous ne pouvons connaître ( prétention “universalisante” du philosophe Kant … ) que des “phénomènes” et non les “choses en soi” …
Une grande majorité de philosophes semblent donc se donner le mot, tout en s’appuyant sur des thèses opposées et au moins diverses, pour proclamer ( c’est en fait leur “arbitraire radical” personnel : celui de leur propre choix philosophique sur lequel il leur est “impossible” de revenir ), que ce qu’il y a de plus “propre” dans notre “identité subjective”, est un “arbitraire radical” qui échappe nécessairement ( ou par la volonté inconsciente du philosophe … ) au pouvoir d’investigation de la science et de la “Raison” en général.
Mais il se peut que nous pouvons percevoir certaines de nos capacités comme empiriques aléatoires que parce que nous avons certaines capacités cognitives humaines personnelles propres qui, si nous ne les avions pas, nous empêcheraient précisément de nous penser comme “ce que nous pensons être” :
Si nous n’étions pas un “être humain” avec un cerveau d’être humain, mais comme dans l’exemple cité par F. Galichet, un “axolotl”, nous ne nous poserions pas du tout une telle question “Pourquoi suis-je moi ?” .
Il existe donc des caractéristiques toutes “empiriques”, mais essentielles pour permettre à une personne humaine de “philosopher ” ainsi : Quand je parle de moi-même comme “sujet”, il s’agit bien d’un ensemble de capacités “cognitives” qui peuvent se retrouver “tout aussi bien” chez la plupart des êtres humains, et même pour certaines, chez de nombreuses espèces animales, etc.
Il faut donc au moins distinguer ces capacités très générales et “anonymes” d’un cerveau complexe, des particularités des “mémoires biographiques” construisant des “récits mémoriels individuels” où le “je suis moi” se conforte, et plus encore des représentations perceptives que chacun peut avoir de son corps propre ou de l’extérieur du corps des autres.
B – Mais d’une certaine façon, il y a aussi du vrai possible dans cette “séparabilité” du sujet abstrait “sans qualités” précises de telle ou telle des propriétés qu’une description empirique extérieure peut m’attribuer.
Mais dans ce cas, qu’est-ce qui permet de dire qu’il s’agit d’un “arbitraire radical” métaphysique ou transcendantal ou “originaire” que rien d’empirique ne pourrait combler ?
Sil est vrai qu’en effet “je” pourrais avoir telle ou telle propriété particulière que d’autres ont et que je n’ai pas, qu’est-ce qui interdirait en soi que “je” puisse également les acquérir ?
Il se trouve juste, que pour le moment, je ne les ai pas, mais rien n’interdit , en particulier dans un développement technique futur, que “je” n’acquière de telles “qualités” … ou propriétés non “essentielles”.
Le “Pourquoi suis-je moi ?” n’a alors rien de “métaphysiquement” arbitraire , mais est purement lié à une situation actuelle de limitation actuelle de notre biologie cérébrale humaine ou des techniques biologiques, qui dans un futur possible “me” permettraient de devenir en effet “tout aussi bien” semblable à n’importe quel “autre” et réciproquement : il s’agit alors d’une capacité générale de “plasticité” de nos personnalités qui n’est pas aujourd’hui accessible aux êtres humains, en effet, et qui nous “condamnent” encore à rester dans “notre peau” …
Si on objecte alors que le problème n’est pas tellement de pouvoir se transformer suffisamment ( “métamorphose” kafkaïenne généralisée ) pour pouvoir acquérir toute caractéristique empirique perceptible ou imaginable chez d’autres, mais que dans tous ces cas là , chaque “personne” n’en continuerait pas moins à se sentir et à se penser comme “enfermée” dans son “monde” ( illusion “solipsiste” ), sans pouvoir en sortir, je réponds alors que cela est dû, non à une “solitude métaphysique originaire”, mais simplement à la connectivité neuronale beaucoup plus dense à l’intérieur de notre système nerveux et notamment de notre cerveau, comparée aux types de “connexions” linguistiques, communicationnelles, sociale, culturelles, ou encore “écosystémiques” naturelles etc. que nous entretenons avec les “autres”,
dont le réseau de connexion, aussi complexe soit-il déjà , comme en attestent les systèmes de “communication d’information”dans les écosystèmes, n’atteint pas la densité intégrée multi – réflexive caractéristique de nos cerveaux humains.
Le problème est alors encore une fois, de nature “scientifico-technique” :
Comment construire des connexions beaucoup plus denses entre différents cerveaux, de façon que cette connectivité puisse devenir similaire à celle qu’entretiennent par exemple nos deux hémisphères cérébraux ( connectivité que l’ évolution biologique a réussi à établir et à maintenir en la complexifiant )
Bien sûr il serait nécessaire d’avoir de longs processus d’apprentissage, pour que les cerveaux ainsi connectés beaucoup plus densément, apprennent à constituer une expérience consciente commune d’un tel “soi augmenté”, à la manière dont nos deux hémisphères ont appris à coordonner leurs activités dans la production d’une “conscience de soi unifiée”.
Il est probable aussi que la nécessité de coordonner une action extérieure à travers un ou plusieurs “corps ” cherchant à suivre un même projet ou une même forme ( à la manière de la coordination actuelle de danseurs ou de musiciens, ou autres “collectifs” dont la coordination est capitale), est un élément canalisateur très puissant de la “conscience de soi” potentielle d’une telle entité complexe.
Dans les deux cas ( A ou B ci-dessus ) , je peux parfaitement considérer que là où François Galichet perçoit ( croyance philosophique ) un “arbitraire radical”, je ne conçois qu’une limite empirique actuelle toute relative qui pourrait être un jour transcendée par le “progrès scientifique et technique” .
En tout cas, en pensant au moins un tel développement comme “possible” en termes scientifiques et techniques, on ne se ferme pas a priori les portes, comme le font les philosophes de l'”arbitraire radical” …
Qu’aujourd’hui les êtres humains avec la configuration de leur organisation corporelle et cérébrale actuelles ne puissent pas “sortir” de la “condition humaine” actuelle, et se sentent “enfermés” dans l’organisation biologique individualisée qu’ils ont héritée du passé évolutif de leur espèce, ne signifie nullement qu’il s’agisse d’un “arbitraire métaphysique radical” :
C’est bien plutôt cette croyance qu’ils s’imposent à eux-mêmes “arbitrairement”, comme “allant de soi”, parce qu’ils n’ont pas d’autres expérience possible à disposition.
Ni plus ni moins que de s’imaginer être une “âme spirituelle” dans un “corps matériel” en se laissant abuser par les simplifications représentatives de tels “concepts” .
En réalité, “nous” ne savons pas encore réellement ( scientifiquement ) tout ce que nous “sommes” ou pourrions devenir.
La question “Pourquoi suis-je moi?” qui semble à première vue très subtilement “profonde”, est peut-être tout simplement encore mal posée :
Quand on voit combien en fait l’imaginaire métaphysique des philosophes, y compris les plus “grands penseurs” parmi eux, produit en fait, pour chacun d’entre eux, des représentations conceptuelles diverses personnelles sur ce que c’est que “penser” ou les conceptions très différentes que se fait un Descartes de la “substance pensante” qu’il “pense” être, et du “sujet transcendantal” qu’un Kant s’évertue à penser comme “inconnaissable” en soi, ou des “phénoménologues” qui prétendent penser l’ “originaire” … … je considère pour ma part, qu’on est simplement encore, dans ces conceptions “métaphysiques”, dans la préhistoire d’un savoir que seules les connaissances scientifiques et les performances techniques futures pourront reformuler de façon aujourd’hui sans doute encore inimaginable :
C’est le progrès des “neurosciences” et de la compréhension des systèmes matériels organisés complexes qui permettra plus probablement de sortir des actuelles apories de l’ “arbitraire radical” dont certains philosophes comme François Galichet croient pouvoir nous “éclairer”.
Assurément, nous aurons encore bien des surprises sur “ce que nous sommes” ou pouvons potentiellement être, devenir, … ou redevenir, y compris après ce que nous croyons aujourd’hui être notre “mort” et sa supposée irréversibilité.
Certaines “expériences de pensée” peuvent cependant dès aujourd’hui nous défaire de certaines “certitudes de bon sens” :
Qu’est-ce qui, “logiquement“, nous empêcherait de nous “réveiller” un jour, après notre “mort” aujourd’hui supposée irréversible ? Et de nous “rappeler” de toutes sortes de “vies antérieures” partiellement oubliées et diversement “remixées” ? Et de visiter ou revisiter les “mémoires” et les “identités” des “autres” ? D’autres que “moi” ont déjà proposé que “Moi est un autre …”
Bien sûr, un tel système matériel organisé, faisant suite dans des siècles, des millénaires, voire seulement des millions d’années ( ? ), à la forme de vie “humaine” actuellement résultante de l’ évolution biologique et “culturelle” de l’ “écosystème Terre”, et rendant possible, dans cette nouvelle forme supérieure de conscience émergente, le “souvenir” auto-re-organisé de “consciences” ayant déjà vécu comme “être humain” , seront simultanément aussi, “conscience de soi” de ce pouvoir “multi-conscient” de faire émerger d’autres consciences “similaires”, actuelles, passées ou futures
Certains dirons alors que seule cette “super-conscience” serait la “véritable conscience” et que les différentes consciences partielles composantes, notamment celles qui se considéreraient comme “ayant déjà existé”, ne seraient que des “illusions” .
Mais n’est-ce pas là un postulat arbitraire, de penser qu’une “conscience de soi” est nécessairement “une et indivisible” et qu’une “identité consciente” nait et meurt “radicalement pour toujours” , avec la disparition du seul corps dont elle a pu faire l’expérience lors de son “unique vie”, quels que soient les réorganisations matérielles futures imaginables de l’univers ?
Ne s’agit-il pas là d’une croyance métaphysique héritière de la notion d’ “âme individuée” unique, telle que la tradition chrétienne en a produit la représentation culturelle, notion qui n’est pas nécessairement déjà celle d’ autres cultures traditionnelles ( cf . la “transmigration des âmes” qui dissocie l’unité identitaire d’une telle “âme” de l’identité unitaire des “incarnations successives ) ? Et qui surtout n’est pas le dernier mot des évolutions futures possibles de la matière organisée, notamment à partir de moment où une telle évolution est de plus en plus techniquement contrôlable par les êtres conscients eux-mêmes.
La question devient alors plutôt de nature scientifico-technique ,
C’est à dire où l’aspect actuellement de “science-fiction” vient simplement prolonger dans un futur plus ou moins lointain la métamorphose effective du pouvoir scientifico-technique actuel.
Comment un super-cerveau conscient pourrait-il se représenter lui-même comme “divisible”, partageable, reproductible … et en réaliser effectivement, par une capacité technique de réorganisation et de réagencement de sa propre organisation matérielle, toutes sortes de “métamorphoses” partielles , conscientes, semi-conscientes, inconscientes, diversement connectées entre elles et avec un “écosystème” extérieur lui aussi métamorphosé … ?
Je suppose donc que ceux qui aujourd’hui regarderaient un tel “avenir” avec la crainte habituelle de la “technophobie”, trouveront en fait moins d’arguments d'”impossibilité technique” que de craintes “éthico-politiques” concernant de telles perspectives. A cause de la projection des difficultés économico-politiques de l’homo sapiens économicus actuel dans tout l’ horizon “”bouché” ou “catastrophiste” dans lequel ils pensent l’avenir de la planète …
Et la résistance aussi de toutes les croyances religieuses, qui n’envisagent de tels “super-pouvoirs” de la matière organisée que sous le contrôle d’un supposé “projet divin” ou “dessein intelligent” , et qui tiennent absolument à interdire aux êtres humains de sortir de leurs conditions de “finitude” actuelles.
Quant à Vous, c’est Vous qui voyez …
Trois hypothèses pour une conscience future
L’objet de cet article est d’explorer les conditions d’une conscience organique future possible qui soit à la fois totalement consciente d’ “elle-même” et capable d’implémenter une pluralité de consciences distinctes, qui puissent, à partir des seules traces de “mémoires biographiques” réelles du passé ou imaginaires artificielles, produire ou reproduire des consciences personnelles numériquement identiques à leurs “modèles-mémoires” préalables.
Dans ce but, nous poserons trois hypothèses de base ( de nature philosophique spéculative ), dont la première, concernant le pouvoir d’un organisme-cerveau d’ être conscient, est la plus simple à comprendre dans le cadre des connaissances scientifiques actuelles. Cette première hypothèse, tout en étant encore partiellement l’objet d’un choix “philosophique” ( un type de “matérialisme” ), rencontre cependant un fort consensus grandissant dans la communauté scientifique en particulier dans le secteur des “neurosciences”.
La deuxième concerne la question spécifique des “mémoires biographiques”, comprenant des “traces” diverses permettant à une conscience au sens précédent de se représenter à elle-même comme continue dans le temps et/ou un jour “clonable” en conservant, pour chaque conscience “clonée”, le souvenir d’avoir été par le passé, une et une seule conscience identifiable également dans l’unicité numérique de référence objective d’un “organisme” localisé dans l’espace temps. Une telle hypothèse, actuellement seulement testable sous forme d’ “expérience de pensée“, ne pourra être effectivement testée, soit pour la confirmer, soit pour l’infirmer, que dans un futur qui demande encore un développement techno-scientifique important, bien que certains des éléments nécessaires à un tel test soient déjà partiellement présents dans la littérature scientifique actuelle.
Une expérience de pensée concernant l’identité de notre conscience passée :
Considérons l’essentiel des traces mémoires distribuées dans notre cerveau et qui nous permettent, le matin au réveil, ou mieux, après une anesthésie, de nous rappeler que la conscience actuelle éveillée est dans une certaine continuité avec les souvenirs que nous avons d’états antérieurs de cette “même conscience”, dans ce qu’on appelle en général la “mémoire biographique“, celle qui est gravement perturbée lors de certains traumatismes des personnes amnésiques qui “ne savent plus qui elles sont”, c’est à dire qui elles étaient avant leur accident ou traumatisme. Très souvent elles ont conservé d’autres fonctions générales de la vie consciente : des savoir faire comme la capacité linguistique, le souvenir donc du “sens des mots” ( “mémoire sémantique”, etc. ), ou des capacités psychomotrices comme une compétence pragmatique d’instrumentiste musical, sans qu’elles puissent cependant savoir consciemment ou dire d’où leur vient cette compétence.
Remarque : cette distinction d’une forme spécifique de mémoire concernant la continuité temporelle de la conscience actuelle et des états de conscience passés qui est attestée par tous ces cas connus de perte ou de déficit important de la “mémoire biographique”, montre au moins une chose :
Il y a une distinction importante à faire entre les ressources cognitives permettant à un cerveau d’être conscient “ici et maintenant” de certains aspects de son environnement actuel ( y compris de son corps propre ) et de la réflexivité de sa conscience actuelle, et les processus cérébraux de construction d’une représentation du passé et de mise en cohérence des souvenirs permettant au cerveau conscient actuel de s’attribuer une “histoire”, supposée garantir son “unicité numérique”, entre son passé et sa “conscience de soi” actuelle. Il peut d’ailleurs exister différentes variantes théoriques concernant les facteurs importants et leur contribution à la constitution et à l’ entretien d’une telle “mémoire biographique”.
Imaginons maintenant que l’essentiel de l’ensemble de ces traces mémorielles qui nous permettent, “au réveil”, de nous reconnaître comme ayant un passé à travers la présence de nos “souvenirs” ( de la veille, ou de notre enfance, etc. ), puisse être “cloné” et donné à interpréter à un cerveau conscient, comme s’il s’agissait de son propre passé, ou du moins avec une capacité suffisante à entrer en concurrence avec les souvenirs “naturels” propres au cerveau d’ “accueil” .
En un certain sens, le cerveau d’accueil de ses traces aurait au moins en partie la connaissance d’ “avoir été” dans le passé cet ensemble relativement cohérent de souvenirs “clonés”. Bien évidemment dans la réalité d’une telle opération physique de fusion des traces d’une autre mémoire biographique avec une mémoire biographique “naturelle”, il y aurait tout un apprentissage adaptatif à faire par le cerveau “récepteur”, pour construire une cohérence entre sa conscience biographique actuelle et ces bribes de “souvenirs” provenant d'”ailleurs”: un travail cérébral du même ordre que celui d’un amnésique qui cherche à reconstituer son “récit auto-biographique” à partir des éléments d’information que son entourage lui fournit sur son identité antérieure..
Ou encore plus ordinairement, lorsque nous “confortons” des souvenirs défaillants en nous appuyant sur d’anciennes photos ou d’écrits, ou des témoignages de personnes supposées avoir un ancien vécu commun avec nous.
Dans toute notre vie consciente actuelle nous réadaptons en permanence nos “contenus de conscience actuels” avec les traces de nos anciens “contenus de conscience”, pour autant qu’une cohérence mentale suffisante peut être trouvée entre le vécu actuel et les vécus antérieurs. De nombreux exemples permettent de savoir que des souvenirs antérieurs trop contradictoires avec nos représentations conscientes actuelles peuvent être diversement “refoulés” ou “effacés”, ou transformés de façon à être moins “traumatiques” ou rationnellement ou émotionnellement plus cohérents avec notre conscience actuelle de “nous-mêmes”.
Si un tel “clonage” de traces biographiques d’un individu est fait à de multiples exemplaires, chacun des cerveaux receveurs, pourra de la même façon, devenir conscient d’avoir “vécu” ces “souvenirs”, et donc d’ “avoir été”, au moins en partie, cette personne dont la “mémoire biographique vécue” aura été “clonée” dans son propre cerveau.
Il est bien sûr possible d’objecter que ce ne seraient que de “faux souvenirs”, sous prétexte que dans la réalité physique des processus biologiques des cerveaux receveurs, ces receveurs n’auraient pas “réellement vécu” ( en termes d'”objectivité historique scientifique” ce dont ils sont persuadés de se souvenir.
Encore faudrait-il que l’on puisse faire effectivement une différence pertinente.
Pouvons-nous faire une réelle différence entre d’anciens souvenirs, notamment de la petite enfance que nous pensons avoir “réellement vécus, et ceux que nous avons “reconstitués” à partir des récits de nos proches, des photos ou autres documents extérieurs ?
Si on cherche à sortir des contradictions potentielles entre tous les types de “vécus subjectifs” et des sentiments de certitude associés par les personnes concernées, on est amené à considérer que les seules méthodes fiables pour établir la réalité factuelle d’un évènement rapporté au passé, sont les méthodes scientifiques ( cf police scientifique, recoupements et contrôles divers effectués par des experts de différentes disciplines, etc. ) .
Mais, en reconstruisant ainsi, par ces méthodes scientifiques, des “évènements objectifs“, en termes de cohérence scientifique logique postulant l’unicité “en soi” d’un évènement physique réel, indépendamment de la diversité phénoménale des “expériences vécues” qui ont pu être subjectivement élaborées et mémorisées par les personnes plus ou moins proches ou concernées par l’évènement, on est alors amené à considérer que de tels “évènements objectifs” ne sont en fait jamais “vécus” par personne, que tous ces “souvenirs vécus” rapportés à un tel “évènement objectif” sont tous des interprétations et réinterprétations en cascade subjectives, dont chacune a sa propre cohérence mais qui peuvent chacune à son tour être considérée comme un “évènement objectif secondaire” : une représentation – illusion, existe comme telle et possède donc, comme n’importe quelle “représentation consciente”, une organisation cérébrale fonctionnelle “support” :
Si on peut établir scientifiquement que les “licornes” n’existent pas, il n’empêche qu’il existe des “représentations” individuelles ou collectives de telles “licornes” et que ces croyances elles-mêmes constituent comme telles des objets dont une certaine existence objective peut être établie :
Dans les termes du “monisme matérialiste” dont je me réclame, toute construction “subjective”, individuelle ou collective, toute “représentation”, mentale ou physiquement extériorisée d’une “entité” existante ou non, est en elle-même, comme support “signifiant”, une organisation matérielle particulière ( par exemple un état cérébral particulier ) , qui peut être potentiellement distinguée physiquement, comme support signifiant, des autres “représentations” :
Si je me donne mentalement l’image d’une “licorne rose“, si je suis capable de la distinguer d’une autre image ( comme autre classe ou comme autre occurrence ), une telle distinction suppose un support “physique” de cette distinction ( une légère différence d’organisation d’un état cérébral ) :
Toute “pensée” différenciée suppose des “traces” physiques différenciées, même si elles sont “distribuées” et difficiles à déceler et à identifier.
Pas de “pensée” sans une forme ou une autre de “cerveau pensant”, c’est à dire d’organisation matérielle complexe qui permet l’ “émergence” de cette “pensée”.
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La 3ème hypothèse :
La troisième hypothèse est la plus difficile à cerner dans le contexte scientifique ou de “métaphysique spontanée” des connaissances scientifiques actuelles sur la façon dont une conscience de soi individuée reconnait sa propre “identité numérique”. Elle concerne alors la possibilité, que dans une telle superstructure matérielle organisée future, toutes sortes de “consciences individuées partielles” dans une forme de “plasticité” de l’expérience consciente future, pourraient se constituer, se recombiner, devenir réversiblement plus ou moins “individuées” ou “collectives”, et se restructurer en termes de processus “conscients” ou “inconscients” , en fonction des interactions d’une telle matière organisée “sentiente” et “pensante” ( “conscience future” ) avec le reste de l’organisation matérielle “inconsciente” de l’Univers.
La question peut alors devenir celle d’une reconstitution possible, parmi tout ce foisonnement de “récits biographiques” composés à la fois de bribes scientifiquement “factuelles” ( corroborées par une “histoire scientifique objective” concernant l’existence passée “réelle” de tel ou tel “personnage” ou “personne” ) et de récits imaginaires de toutes sortes de “fictions” et de “créatures virtuelles”, de “reconstitutions historiques” à ce point “réalistes” que leurs acteurs conscients penseront réellement être en interaction avec des “personnes ressuscitées” qui elles-mêmes , se penseront ainsi :
Il peut donc se produire, dans une telle configuration de conscience future, que la distinction de la “mémoire du passé, du “vécu actuel” et de l'”imagination du possible” devienne suffisamment soumise aux nouvelles capacités scientifico-techniques , que ce que nous pensons être aujourd’hui notre “identité subjective consciente”, en la supposant “unique” dans le temps, bornée de façon irréversible par notre “naissance” dans le passé et par notre “mort”, apparaîtra en effet comme une croyance illusoire liée à d’anciennes représentations culturelles archaïques. Mais que, dans cette nouvelle “conscience future”, les “identités conscientes individuées” seraient purement provisoirement “temporellement uniques”, mais pourraient de fait devenir capables de “ressusciter” n’importe quelle forme de conscience actuelle et donc qu’effectivement, “nous” ( consciences actuelles de “condition humaine finie et mortelle” ) , pourrions réapparaître comme conscience de soi se reconnaissant elle-même, comme le matin, au réveil, ou après une anesthésie générale ou un coma, nous pouvons nous “réveiller” en nous pensant comme étant la même “conscience individuelle” qui s’est “endormie” la veille , ou pour certains comas, des mois avant.
Bien sûr, la prise de conscience que les consciences “ressuscitées” auraient alors de leur existence corporelle , individuée ou collective, serait relative au tout “nouvel environnement” dans lequel elles se réveilleraient, et où elles feraient l’expérience, à la fois de leur “souvenir d’avoir déjà existé” et de leur adaptation au nouveau contexte de “vie”.
Remarque : certains diront sans doute que c’est peut-être déjà le cas maintenant : que nous vivons en fait déjà dans une telle “matrice”, où nos expériences conscientes sont “fabriquées” par quelque pouvoir très supérieur à la conscience que nous en avons. ( Il existe bien sûr de telles versions “religieuses” de “vision en Dieu” , ou des versions de “science-fiction” où le “grand ordonnateur divin” est remplacé par un “grand ordinateur”… invisible )
Dans notre hypothèse 3, ce n’est pas “aujourd’hui” que nous vivons dans un tel univers, parce que nous en aurions au moins des indices matériels possibles :
C’est ce que postule notre hypothèse 1 : toute “super-conscience”possède nécessairement une “infrastructure matérielle organisée” , dont les aspects “élémentaires” sont fondamentalement communs et accessibles à notre science actuelle.
Précisions :
1 L’Hypothèse 1 :
Cette hypothèse consiste à “naturaliser” entièrement la capacité générale pour une organisation matérielle physique de devenir “consciente” d’un certain nombre des aspects du réel de l’univers physique dont elle est une partie, et de devenir aussi consciente d’une différence entre une partie “extérieure” de son expérience du réel consciemment “perçu” et une partie de ce même réel constituant un “corps propre” ( partie de l’univers particulièrement dense en “boucles sensori-motrices” reliant ce “corps propre” à la partie matérielle spécialisée “cérébrale” permettant l’ émergence d”une “conscience” )
Une telle organisation matérielle consciente peut enfin acquérir la capacité “réflexive” par laquelle la conscience peut se faire elle-même “objet” de son attention :
Non seulement la “conscience du soi corporel”, ( dont de nombreuses espèces animales semblent capables : test du miroir ), mais une conscience de sa propre conscience, qui suppose sans doute l’intermédiation d’une “pensée – langage”, dont la présence chez certaines autres espèces animales que l’ homme n’est pas encore clairement attestée ( dans la mesure où il faudrait pouvoir “parler” avec d’autres animaux que nous-mêmes de ce qu’ils sont en train de penser et de ce qu’ils imaginent eux-mêmes que nous pensons …
Il s’agit là de partager un monde de signification symboliques subjectives et notamment de positions “grammaticales” en “première personne” et pas seulement de partager la conscience d’un monde extérieur commun, où chacun “vit sa vie” en coordonnant ses comportements avec les autres “vivants”.
Peu importe les capacités spécifiques d’une conscience actuellement existante ou que nous pouvons imaginer comme plus puissante que les nôtres dans différents types d’organismes, notre “Hypothèse 1” consiste toujours à poser que ces capacités “extraordinaires” de la conscience ou de ses états possibles sont nécessairement “supportées” par une organisation physique matérielle dont la complexité d’interactions connectées produit nécessairement, dans certaines situations et configurations ce que nous appelons la “conscience de quelque chose” et assez rapidement alors, le “retour” réflexif de cette conscience se prenant elle-même pour “objet”.
Nous pouvons appeler cette Hypothèse 1, l’Hypothèse de la naturalité physique matérielle organisée des “capacités de la conscience”.
La conséquence essentielle de cette hypothèse, aujourd’hui largement admise dans les communautés scientifiques, est qu’il est possible d’ étudier scientifiquement les caractéristiques des phénomènes de la conscience, et d’en formuler des modèles explicatifs théoriques testables par des méthodes d’observation, d’expérimentation et de simulation, comme dans l’ ensemble des disciplines scientifiques. Avec en particulier le souci d’expliciter les liens entre le niveau global le plus complexe où les “états de conscience” émergent et les niveaux d’organisation physiques sous-jacents, aux différentes échelles de la complexité matérielle.
Il s’agit donc de poser que nous n’aurons plus aucun besoin de faire appel à des propriétés substantielles mystérieuses, soit d’une “substance pensante” ou “substance vivante”, qui seraient différentes de la matière organisée, soit de multiples “substances individuelles” du genre “âme” dont il faudrait imaginer l’ intervention séparée, supplémentaire par rapport à la complexité de l’organisation corporelle et notamment cérébrale.
Nous supposons donc, dans cette Hypothèse 1, qu’il est possible d’agir physiquement en retour sur la réalité physique complexe constituée par un “organisme conscient”, et que des modifications organisationnelles précises de ces interactions peuvent avoir des effets très importants sur la construction des dynamiques de la conscience., de même que les dynamiques de la conscience – constituées de dynamiques matérielles/énergétiques/informationnelles – peuvent rétroagir sur les niveaux d’organisation “inférieurs” , qu’ils soient externes ou internes à l’organisme conscient.
Les individualités que nous sommes,comme “personnes humaines conscientes”, même dans leur plus grande “singularité”, ne sont pas des “substances” métaphysiquement distinctes et/ou métaphysiquement articulées par une “chose en soi” inconnaissable ou par une conjonction arbitraire mystérieuse ou divine d’une “âme spirituelle” avec un “corps matériel”, mais des systèmes matériels organisés, dont les processus de base d’organisation et de capacité de “survie” dans leur environnement sont fondamentalement les mêmes.
Nous pouvons donc apprendre énormément sur notre propre fonctionnement “personnel” ( “Qui suis-je ?” ) en comprenant scientifiquement de mieux en mieux comment en général les différents niveaux de complexité fonctionnent , chez les autres êtres humains, et de proche en proche, chez d’autres systèmes vivants organisés, ou d’autres dynamiques matérielles de systèmes complexes.
Les progrès d’une telle connaissance scientifique générale des systèmes complexes et de leurs diversités organisationnelle, peut donc servir de socle à notre réflexion sur toute “conscience future possible”, qui sera toujours elle-même une organisation matérielle, aux propriétés “émergentes” encore inconnues, mais dont les “ingrédients” et interactions fondamentales élémentaires seront les mêmes que ceux qui sont déjà utilisés dans les organisation physiques actuellement existantes dans l’Univers.
Et bien évidemment aussi, si la “réalité en soi” de ces “composants” est elle-même supposée suffisamment stabilisée, par l’existence même de notre Univers physique depuis le “big bang”, la connaissance que nous en avons est cependant encore lacunaire et simpliste, et peut en particulier être révisée rétroactivement par ce que nous saurons des propriétés “émergentes” encore inconnues ou insoupçonnées de niveaux d’organisation de la matière dont nous n’avons pas encore actuellement l’expérience possible.
Paradoxes de l’identité personnelle
Le 8 octobre 2021, un article de Jean-Pierre Dupuy paraît dans “AOC”, intitulé “Métaphysique de l’ Anomalie”
https://aoc.media/opinion/2021/12/28/metaphysique-de-lanomalie-2/
Les paradoxes de l’identité personnelle sont en général liés à des paradoxes de la dimension temporelle. Rien d’étonnant à cela : Le temps étant la dimension suivant laquelle je peux conserver toute mon “identité personnelle numérique”, tout en devenant éventuellement très différent au cours du temps de ce que j’ étais, “conceptuellement” ( en termes de caractéristiques d’ “essence” conceptuelle ou comme on dit en logique de la “compréhension” du concept ).
Lorsque je parle d’ “identité personnelle“( à savoir en particulier “mon identité personnelle” ) , je distingue bien sûr cette question de l'”identité personnelle” ( liée à l’Idéal de la “Personne Libre et Égale” et qui pose d’abord une question “de jure” ) de celle de l’ “identité individuelle“, qui est d’abord une question concernant la réalité “de facto” de l’existence physique des “individus”, comme systèmes biologiques “corporels” complexes en relation complexe avec leur “environnement” lui même organisé de façon complexe, et susceptible d’études “pluri-, inter- et trans- disciplinaires quant à l’organisation dynamique complexe des relations entre “individuation” et “organisation sociale” dans l’ espèce “homo sapiens” ou le “genre homo” dans son évolution biologique rétroagissant notamment par ses productions “culturelles” sur l’ensemble des “écosystèmes” qui ont rendu possible son émergence.
Mais cette distinction des notions de “personne” et d’ “individu” ne tire sa valeur propre que de la décision même, prise en tant que “personne”, et plus précisément “en première personne” ( par “moi-même” en disant “JE”) , se posant elle-même comme “Libre et Égale”, d’effectuer une telle distinction entre l’Idéal d’ “autonomie personnelle” et notamment d’ “autonomie de la volonté” ( “de jure” ) et la réalité physique complexe où la “personne” se reconnait aussi, de facto, comme “individu” ( même reconnu ensuite en en “troisième personne” ), au sens à la fois du membre d’une “espèce biologique”, et d’ “appartenances”, sociologiques, économiques, culturelles, etc. multiples à des “organisations” supra-individuelles, ayant leur propre niveau de fonctionnement complexe.
L’articulation entre “personne” et “individu” se faisant dans les deux sens :
1. Je pose comme préalable que toute capacité “personnelle” effective, en acte, suppose une organisation physique effective, de soubassement d’abord “biologique” (postulat de type “réalisme scientifique” ) : ensemble des dynamiques bio-physiques qui constituent le cadre de l'”évolution du vivant” pour donner lieu à une organisation dynamique corporelle et notamment cérébrale capable de se représenter elle-même dans une position “singulière” au sein de tout le système de “représentations” ( conscientes et inconscientes ) que le cerveau vivant ( et ici même mon cerveau vivant ) peut élaborer au sujet de son corps propre et de l’environnement-monde où il existe comme “vivant”.
Il n’est donc nullement nécessaire, dans la perspective que je propose, de supposer un quelconque “dualisme” à l’intérieur du “réel de facto” , qui opposerait, à la manière cartésienne une “substance pensante” à une “substance étendue”, ni même à la manière kantienne une réalité “nouménale” inaccessible à notre connaissance et une réalité “phénoménale” qui serait seule accessible à la connaissance.
La position que je choisis de prendre est donc de type “monisme matérialisme émergentiste” : toute forme d’existence réelle, dont ma propre existence individuelle et personnelle consciente d’elle-même , suppose une organisation matérielle certes extrêmement complexe, mais non pas d’une complexité “infinie”, mais bien hiérarchiquement déterminable en termes d’ “échelles” d’intégration, depuis les structures physiques “élémentaires” ( décrites par les théories de la physique, notamment quantique ) jusqu’à l’organisation biologique corps-cerveau, dont le tissu d’interactions avec son environnement lui aussi physique, produit de facto ce que j’appelle “ma conscience de moi-même”.
Les progrès de nos connaissances scientifiques sur une telle “matière organisée” aux différents niveaux de complexité, finiront par permettre aux êtres organisés conscients que nous sommes, à se donner des représentations et modélisations suffisamment efficientes et précises de cette complexité, que de nombreux effets de “rétroaction” en particulier redescendants dans les niveaux d’échelle, nous donneront des moyens d’interaction actuellement encore totalement “inouïs”, puisque non encore “émergés” de formes d’organisation complexes encore inexistantes et n’ayant peut être encore jamais existé dans l’univers depuis le “big bang” …
2. La distinction “personne / individu ” est donc elle-même avant tout liée à la distinction “de jure” / “de facto” , elle même instituée – dans sa valeur projective – par un “de jure” auto-proclamé par la personne qui s’ “autorise” elle-même ( et dont d’une certaine façon, le “sapere aude” des “Lumières” kantiennes, mais aussi bien d’autres prises de pouvoir philosophique auto-référentes ont déjà pu se réclamer dans l’histoire … ).
Et, il se trouve, parce que “je” le veux ainsi, que je m’autorise en effet de l'”autonomie personnelle” radicale de ma propre volonté.
Et bien sûr, rien ne garantit “a priori“, ni dans aucun “de facto“, que l’ Idéal d’ “Égale Liberté Libre Égalité” puisse se généraliser suffisamment dans des “incarnations” physiques organisationnelles réelles, pour passer de façon beaucoup plus convaincante et efficace de l’énoncé de l’ Idéal à une “réalisation effective” .
La seule “garantie” qui peut valoir au yeux de la “personne libre et égale” est alors celle de l’autonomie de la volonté propre de cette personne à mettre cet Idéal en œuvre dans la mesure de ses propres possibles “individuels” sur lesquels elle pense avoir suffisamment à la fois de prise corporelle ( tant que “je” en personne “commande” à mon “corps propre” les actes compatibles avec un tel idéal “personnel” propre ).
Car c’est précisément en ce lieu de l’autonomie de sa propre volonté, qu’elle PEUT, si elle le VEUT, décider de définir ce qui VAUT pour elle-même et jusqu’à quel point, cette VALEUR, posée au minimum comme Idéal, “doit” au minimum pour cette personne elle-même, se traduire en “réalité”.
Remarque : il est facile de comprendre que toute personne qui “pense” et “réfléchit” à ses propres “valeurs idéales” a au minimum la volonté d’y réfléchir, ou du moins de CONTINUER ou de REPRENDRE une telle “réflexion” si d’aventure une telle “première réflexion” lui était venue entièrement du “dehors” ou avait soudain surgi de façon inconsciente et/ou aléatoire des “profondeurs de son inconscient” pour se “révéler” dans sa propre conscience.
Nous sommes donc capables de construire une “représentation”, notamment langagière, d’un tel Idéal, et donc de l’inscrire, d’une certaine façon, dans notre propre mémoire biologique “cérébrale”, et diversement stabilisable par les supports d’information extérieurs, culturels et techniques dont nous nous servons pour réussir à rétroagir sur notre propre mémoire cérébrale éventuellement défaillante, dans différentes “boucles” de “réafférence”
Et ceci, bien sûr, du simple fait, – que certains peuvent choisir de ne pas reconnaître – …, que toute pensée effective suppose, “en réalité”, une organisation physique capable d’effectuer une telle “pensée”.
( Notamment ce que nous appelons notre “cerveau” … )
Autrement dit, il y a un postulat que je formule, et qui est aujourd’hui de plus en plus commun à de nombreuses personnes, qui est que leur propre pensée consciente n’est réellement possible que grâce à une organisation matérielle complexe, ( notamment cérébrale ) , dont certes nous n’avons encore qu’une connaissance scientifique largement incomplète, mais dont il serait aujourd’hui, à mes yeux et aux yeux de ces personnes, parfaitement incongru de nier la “naturalité biologique”, vu les connaissances scientifiques accumulées, dans la biologie en général et dans les “neurosciences” humaines en particulier.
Un tel postulat d’émergence de la conscience en général et de la “conscience de soi” en particulier, par des dynamiques auto-organisationnelles du réel physique “naturel” n’a bien sûr plus rien à voir avec les dualismes substantiels du “corps” et de l'”esprit” , dont les exemples philosophiques sont bien connus, à la fois hérités des anciennes conceptions “animistes” religieuses ( l’ “âme et le corps” par exemple des monothéismes, ou du platonisme grec ), et de la “solution cartésienne moderne”, d’un “cogito” supposé purement transparent à lui-même comme “substance pensante”, mais aussi du dualisme kantien entre une structure “transcendantale” du sujet, et la réalité empirique “phénoménale” qu’elle est censée “construire”.
Si donc bien évidemment, l’ Idéal n’est pas le Réel, comme “la carte n’est pas le territoire”, il n empêche que toute “carte” est aussi une portion d’un territoire, et qu’elle a besoin pour être interprétée comme “carte d’un territoire” d’un “interprétant” lui-même réel et d’une certaine façon ancré dans le territoire dont il utilise la carte. Ainsi l’organisation de nos “cartes neuronales” est à la fois formellement “auto-organisée” ( en termes de “traitement récursif de l’information”), mais aussi très fortement entrelacée avec les dynamiques auto-organisationnelles physiques, chimiques et biologiques du “support” neuro-cérébral qui “implémente” l’auto-organisation proprement “formelle” du “traitement de l’information et du signal”. Précisément parce que le tout est “auto-organisé” et non pas construit par un super-ingénieur qui chercherait à “fabriquer” une telle “conscience artificielle” en imposant ses propres “plans” de l’extérieur.
Notre position “matérialiste émergentiste” s’apparente ici à celle de Francisco Varela et de la notion de l’ “énaction“, où la polarisation habituelle du “sujet” et de l’ “objet”, est une résultante dynamique de la complexité des interactions dans certaines circonstances de la conservation rétroactive de ces systèmes d’interactions.
Notes :
On peut aussi rapprocher ma position de celle de John Searle :
Comme lui je pense que la traditionnelle “distinction du corps et de l’ esprit” est un faux-problème …
De même les questions traditionnellement posées concernant le “problème difficile de la conscience” ( Chalmers ) me semblent mal posées, en ce sens qu’elles cherchent à résoudre des difficultés qui résultent précisément de la distinction artificielle préalable de la “réalité objective extérieure” et de la “conscience intérieure subjective” . ( On tombe alors sur les questions typiquement cartésiennes d’une “articulation” entre “substances” distinctes ).
Voir aussi la problématique traditionnellement discutée à partir de Locke :
Le prince et le savetier
Mission impensable