En quoi la « Loi Morale Nouvelle » ( centrée sur la Proposition de l’ « Égale Liberté Libre Égalité » ) est-elle « nouvelle », par rapport aux « lois morales anciennes », tout en continuant à utiliser le terme de « Loi Morale » ?
La différence provient du rôle différent qu’y joue désormais la Liberté, comme auto-fondatrice de sa propre « valeur morale ».
1. La plupart des « morales anciennes » – et ceci d’autant plus qu’elles se revendiquent comme « modernes » – , donnent une place importante à la Liberté personnelle dans l’exercice de l’ « obéissance » du « sujet moral » à la « loi morale« .
Les lois MORALES se distinguent précisément des autres types de LOIS auxquelles une personne peut être « soumise », par leur appel à la Liberté du « sujet moral ».
Les autres sens du mot « LOI » se trouvent notamment :
– Soit dans une expression comme « loi de la nature » et / ou « loi de la physique », loi logico-mathématique, etc. Dans ce cas la forme de « soumission » de la personne à ce type de lois, en tant que la personne est aussi en même temps une partie de la réalité ( un « corps » physique, biologique, un organisme vivant appartenant à l’ espèce homo sapiens, un agent économique, le membre individuel d’une société politique, d’une classe sociale, etc… ), est en général appelée « nécessité« , et la place et la fonction de cet « objet » dans le réel est décrite comme la composition plus ou moins complexe d’un certain nombre de facteurs de « causalité« , dont l’ étude fait l’objet de toutes sortes de disciplines « scientifiques », soit de « sciences de la nature », soit de « sciences humaines et sociales », etc…
– Soit dans un sens « juridico-politique », où la personne, comme membre d’une société donnée et notamment comme citoyen « justiciable » d’un « état de droit », est soumise aux « obligations légales » du système juridico-politique en question, qui peuvent devenir « légalement » aussi des contraintes exercées sur la personne par le système juridico-politique.
( Ce qu’on appelle souvent l’exercice du « monopole de la violence légitime dans un état de droit » )
Évidemment, ce deuxième sens du mot « loi »est très important, car il fait déjà une place à la valeur de la notion de « liberté », mais la « liberté » individuelle du membre d’un « état de droit » au sens actuel est cependant soumise à la coercition physique possible du « pouvoir exécutif » réalisant « physiquement » ( en utilisant des contraintes physiques des « lois de la nature » ) sur la personne physique des « sanctions » définies par un « jugement » opéré par le « pouvoir judiciaire ».
Dans toutes les « lois morales« , qui se distinguent à la fois des « lois de la nature » ( règne de la « nécessité » ) et des lois juridico-politiques ( règne de la « contrainte légale » ) , la « loi morale » se rapporte à une « obligation » ou à un « devoir » supposés ( et décrits plus ou moins précisément par cette loi ou des « règles » qui en dérivent ) , qui certes « obligent » le « sujet », mais sans le contraindre, ni par une quelconque « nécessité naturelle », ni par une « obligation juridico-politique », mais simplement en faisant appel à sa « raison » ou à sa « libre volonté personnelle ».
Même les « lois morales » religieuses liées à la croyance d’une origine divine de la « loi morale », et où l’ « auteur divin de la loi » est supposé en plus doté d’une « toute-puissance », sont présentées par leurs « théologiens » comme faisant appel à la LIBERTE de la « créature humaine » : « Dieu a voulu que l’être humain soit libre, tout en souhaitant que les décisions de cette liberté soit conformes à la volonté divine inscrite dans la « loi divine ».
De même , toutes sortes d’autres « lois morales », tout en présentant un « encadrement de la liberté » externe à cette liberté elle-même ( donc « hétéronomes » en ce sens ), ne se présentent elles-mêmes comme « MORALES » que parce qu’elles supposent un « libre consentement » de la personne elle-même à cette restriction instituée par la « loi », donc au minimum sans exercer de contrainte physique a priori ou de violence sur la personne « sujet moral ».
Sans cette liberté personnelle minimale, toutes ces « lois morales » et les « théories morales » qui cherchent à les justifier se sont rendu compte qu’elles risquaient fortement de perdre leur propre qualificatif de « MORALES » .
En proposant le principe d’une « Loi Morale Nouvelle », nous reconnaissons donc qu’une certaine place est déjà intrinsèquement accordée à la Liberté dans ce qui constitue toute « Loi Morale » comme distincte à la fois d’une « Loi de la nature » ou d’une « Loi de la nécessité causale réelle en général » ( lois sociologiques ou psychologiques ou économiques par exemple, etc. alléguées par ces disciplines scientifiques), et distincte d’autre part de toutes les « lois de la société » instituées comme contraintes jurico-politiques collectives pouvant finalement faire appel à une forme de « violence politique légitime » dans un « état de droit ».
Un moment particulièrement significatif d’une évolution plus importante de la notion et de la valeur de la Liberté s’est faite philosophiquement dans la conception kantienne du « sujet moral » capable d’ « autonomie de la volonté », et du point de vue juridico-politique dans la reconnaissance rousseauiste du citoyen comme participant à la formation même de la loi ( ou du contrat social ) à laquelle il est par ailleurs soumis par sa propre volonté intégrée dans la « volonté générale ».
Ce moment philosophico-politique a aussi été signalé par certains auteurs comme passage de la « liberté des Anciens » à la « liberté des Modernes » dans le rapport individu / société .
2. En plus de la présence du libre consentement du « sujet moral » à l’ « obéissance » à la « loi morale », les « lois morales anciennes » comportent un contenu spécifique qui ne se limite pas à la liberté elle-même ou aux conditions de son universalisation possible. C’est en quoi toutes ces « lois morales » différentes se distinguent les unes des autres, même si elles supposent toutes une « libre obéissance ».
Autrement dit il subsiste dans ces « lois morales » une forme d’ « hétéronomie » du contenu de ces lois par rapport à l’ autonomie de la volonté de la personne qui s’y soumet librement.
Remarque : une telle hétéronomie du contenu de la loi est toujours présente lorsqu’une « volonté générale », même librement acceptée par un « citoyen » ayant participé à son élaboration, s’impose à ce citoyen à travers la coercition spécifique de l’ ordre « juridico-politique » de l’ « état de droit ».
Mais dans ce cas nous ne sommes plus dans le cas d’une « loi morale » qui ne peut, comme telle ( comme strictement « morale ») , jamais s’imposer par une quelconque coercition.
Mais dans toutes les « lois morales anciennes », une telle hétéronomie du contenu reste également présente, car la « loi morale » n’y est pas identifiable à la simple proposition d’une « Égale Liberté » : elle prétend en plus savoir, à la place des personnes elles-mêmes, en quoi consiste le rapport entre leur liberté personnelle propre et le contenu général des « droits et devoirs » proposé par la loi à tous les sujets moraux qui la reconnaissent.
Remarque : Kant a été le philosophe qui a le plus remarquablement essayé de définir la « moralité pure », comme étant purement « formelle » au sens où la « loi morale » qu’il propose n’est pas définie par un contenu particulier mais seulement par une « forme a priori »de la moralité, qui déjà dans la proposition kantienne, a un rapport étroit avec l’ « autonomie de la volonté » et donc avec la Liberté.
3. La « Loi Morale Nouvelle » que nous proposons sous les termes d’ « Égale Liberté Libre Égalité » est en un sens aussi « formelle » que la « Loi Morale » kantienne, mais elle ne prétend à aucune « universalité a priori », puisqu’ elle fait dépendre la VALEUR de cette « forme » supposée « universalisable » mais non pas « universelle » ( nommée « Égale Liberté » ), uniquement de la Liberté personnelle des personnes qui choisissent « librement » de la partager … entre toutes les personnes qui font le même choix et seulement si elles font ce même libre choix.
On comprend d’ailleurs alors assez rapidement que le critère essentiel de la « moralité » ne devient plus comme chez Kant celui de l’ universalisation a priori ( dont on sait d’ailleurs à quelles dérives absurdes les essais d’application concrète ont donné lieu de la part de Kant lui-même et de nombre de ses supposés « disciples » ). Le critère de cette nouvelle « moralité formelle » n’est pas la forme générale d’une « Loi » qui se rapprocherait du sens de ce terme lorsqu’il est question de l’ « universalité et de la nécessité des lois de la nature », mais bien la LIBERTE elle-même, en tant qu’elle est à la fois Librement et Également « partageable » entre toutes les « personnes » qui font le libre choix de vouloir ainsi la partager … entre elles.
La « Liberté » et l’ « Égalité » dont il est question dans notre proposition de l’ « Égale Liberté Libre Égalité » ne sont donc des « valeurs » essentielles et fondamentales que pour les personnes qui font le libre choix de les considérer comme telles …
Eet les personnes qui pourraient un jour se réclamer de la « protection » des « Droits » ( d’un « Nouvel ordre juridico-politique » ) institués à partir de telles valeurs, ne peuvent, par définition le faire « légitimement » ( suivant cette légitimité nouvelle ) que si elles reconnaissent elles-mêmes aux autres personnes faisant comme elles ce libre choix, la jouissance du nouveau « droit moral » qu’elles posent ainsi pour elles-mêmes. Et s’ « imposent » donc à elles-mêmes les mêmes conditions générales de « devoirs » – s’il existe et aussi longtemps que subsistent de telles conditions – pour que ces « droits égaux » à l’ « Égale Liberté » soient et deviennent autre chose qu’une simple « incantation verbale » que chacun PEUT en effet énoncer.
Le critère d’ « universalisation » ne vaut donc lui-même que par et pour les personnes qui veulent ainsi librement se donner un tel critère commun ( entre elles ) .
Et en particulier, dans le cas de la « communauté virtuelle » de toutes les personnes qui choisissent librement de participer à l’ énoncé commun de cette proposition d’ « Égale Liberté Libre Égalité » et aux essais que chacune de ces personnes peut faire d’en traduire l’énoncé abstrait dans des situations concrètes vécues ( dans l’ amélioration des conditions réelles de cette « égale liberté » formellement reconnue de chacune de ces personnes par chacune de ces personnes), l' »universalisation » ne s’étend qu’aussi loin que la liberté personnelle de chaque participant VEUT en réaliser l’ extension commune partageable.
Bien sûr, certaines personnes le voudront plus que d’autres, et chercheront davantage à en trouver ou à en construire ou créer les conditions réelles favorables, générales ou locales. Mais quel que soit le degré qualitatif ou quantitatif de « participation » à ce « travail », de « collaboration » formelle ou informelle, chacune sait que PAR DÉFINITION de cette « Loi Morale Nouvelle », elle ne peut pas exiger « légitimement – moralement », au sujet de ces conditions réelles de l’ Égale Liberté, PLUS des autres personnes qu’elle n’est elle-même personnellement prête à fournir comme part personnelle de « travail » nécessaire.
C’est ce que signifie l’ « ÉGALITÉ » de la « LIBERTÉ ».
Mais simultanément, également PAR DÉFINITION ( de la « LIBERTÉ » de cette « ÉGALITÉ » ) , une telle participation « équivalente » à l’ Égale Liberté, à la découverte et à la construction progressive des « conditions réelles » de sa « réalisation effective » , ne peut pas être en général évaluée à l’ aune d’une quelconque mesure comptable définissable a priori, même si chaque personne concernée s’engage ( par DÉFINITION , sa propre « Égale Liberté » fondamentale Y est en cause ) à participer à ce Projet d’ Égale Liberté Libre Égalité dans une « mesure » au moins « équivalente » à ce qu’elle attend … des autres.
De très nombreux « contrats partiels » sont d’ailleurs librement envisageables, dans tous les sens imaginables de cette « partialité » et du pluralisme inhérent à cette « liberté », à condition que les créateurs de ces contrats se demandent réellement en quoi leur travail « collectif » organisé par un tel « contrat partiel » ( politique, juridique, social, culturel, économique, etc. ) est réellement compatible avec le Projet d’ Égale Liberté Libre Égalité et donc en quoi ce contrat partiel n’est pas intrinsèquement contraire à l’ Égale Liberté d’autres personnes voulant établir d’autres contrats partiels censés rester également compatibles avec le Projet Idéal Commun à toutes les « Personnes également libres et librement égales ».